Dans sa série d’écrits sur l’Afrique et ses hommes, l’analyste politique Wilfried Ekanga vient de commettre un texte où il parle du comportement des intellectuels du continent noir qui pour lui, font davantage valoir leurs diplômes et leurs costumes que mettre leur « intelligence » au service du développement.
Ci-dessous, le texte intégral :
LA CRAVATE NE REND PAS INTELLIGENT
L’Afrique francophone est un endroit insolite où l’intelligence se mesure au nombre de diplômes.
Ils se baladent presque toujours en costume-cravate et on les appelle « intellectuels »
Ce sont des gens qui aiment parler sans que personne ne comprenne. Leur compliment préféré c’est : « Ton Français là est trop fort. On est perdus. »
Ça sonne très bien à leurs oreilles.
Au moins il y a une part de vérité : on est bel et bien perdus avec ces gens. Quel est l’intérêt d’ouvrir la bouche si on est le seul à savoir de quoi on parle?
La plus grosse forme de bêtise, c’est de posséder le savoir, sans savoir le partager.
A quoi servent les diplômes des Africains? A quoi servent leurs titres à notre continent ?
Des agrégés en économie qui ne savent pas qu’avant l’arrivée des Allemands, on utilisait le Khrou dans la région de l’actuel Cameroun, et qui pensent que la monnaie en Afrique commence en 1945 ?
Des Docteurs en finance qui n’avaient jamais entendu parler du compte d’opération du francCFA, avant nos petites vidéos sur Facebook ?
Des gens qui parlent de René Descartes et de Heidegger, mais jamais de Mongo Beti, Norbert Zongo ou Nicolas Agbohou dans leurs cours aux étudiants ?
Ils affirment être gaullistes, marxistes, léninistes, mais ne sont pas capables d’expliquer en quoi consistait la réforme économique de Thomas Sankara, ni celles initiées par Lumumba dès juillet 60 en tant que premier ministre.
En Afrique francophone, le diplôme n’est pas un moyen vers une fin, mais plutôt une fin en soi. Il ne permet pas d’atteindre un but, il est carrément LE but.
Les routes peuvent donc ressembler à du couscous brun, les hôpitaux peuvent être dépourvus de scanner et de groupe électrogène, ce n’est pas grave. On est diplômé ; on est intellectuel.
Ce sont ces gens qui dirigent nos pays, ou qui enseignent dans nos universités, ou qui écument les plateaux TV
Ils sont allés dans de « grandes écoles » et ont tous les titres ronflants imaginables. Mais ils continuent de promouvoir la culture du cacao, du café, du coton, dans l’espoir qu’on va se développer avec ça.
Et tant pis si on importe le riz, la tomate, et même le papier-toilette et les cure-dent.
A croire que plus on va à l’école, plus on devient stupide.
Les intellectuels africains mesurent leur intelligence au nombre de citations de Voltaire qu’ils connaissent par cœur; et à la quantité de mots compliqués et inutiles qu’ils sont capables d’aligner dans une phrase simple.
Et quand un petit Macron tousse à 6 000 km et décrète qu’ils font trop d’enfants, ils s’alignent. Car ils ne pensent plus par eux-mêmes. Aucune volonté propre.
Ça ne les inquiète donc pas que la Guinée Conakry se fasse vider de la bauxite qui devrait l’enrichir, et perçoive moins de 10% des revenus des minerais pillés par les multinationales.
Le Maître blanc a identifié à leur place la cause de la pauvreté. Fin de l’histoire.
Ce n’est pas une éducation qu’ils ont reçue, mais un formatage bien huilé, pour penser comme le Maître, contre les leurs.
L’école occidentale n’est pas un pêché comme l’affirme Shekau, mais elle est un cortège d’idées très souvent éloignées de nos problèmes en Afrique.
Voilà pourquoi dans un pays qui a cruellement besoin de technologie et de réappropriation culturelle , vous trouvez plutôt des facultés de « Lettres Modernes Françaises. »
En un mot:
Celui qui pense qu’en mettant une cravate il devient plus intelligent, celui qui pense qu’être diplômé c’est savoir tout de l’autre et méconnaître tout de soi-même, celui-là n’est pas un intellectuel en costume, mais un ignorant constipé.
Et comme le dit Lascony Nysymb: « Quand vous êtes ignorant, vous êtes un danger permanent »
Car l’ignorant ignore qu’il ignore. Et il contamine son entourage de son ignorance.
La preuve : l’état de l’Afrique au 21e siècle.
L’Afrique est le plus grand hôpital psychiatrique du monde.
Et le Cameroun est son pavillon « URGENCES »
Claude Wilfried Ekanga Ekanga
( Il était une fois, le continent le plus riche qui était le plus pauvre, à cause de ses intellectuels )