S’il est un vocable qui s’est durablement imposé dans le langage mondial, c’est assurément celui de ‘‘crise’’. Dans les médias traditionnels comme les medias sociaux, les débats divers dans l’espace public, les différents ordres d’enseignement publics et privés, le terme est scandé sans cesse, mobilisé à toutes les fins, analysé sous tous les angles.
C’est que depuis plusieurs siècles maintenant, pris à l’étau d’une conflictualité quasiment atavique, le monde entier n’a plus connu ni paix, ni sérénité. Les guerres, les conflits, les catastrophes se succèdent, et à leurs suites s’enracinent une pléthore de crises de tous ordres.
L’un des éléments communs à toutes ces crises est le contexte d’insécurité, de précarité et de vulnérabilité qu’elles secrètent, et dans lequel s’habituent à survivre les hommes et les femmes qui les subissent. Le sens de l’avenir aussi s’inverse. Il cesse d’être perçu comme le temps des futurs possibles, un temps dynamique ballotté entre progression ou régression individuelle et collective, un temps disposé à l’accomplissement et à la réalisation de tous et de chacun, mais devient plutôt une source d’où s’écoulent toutes sortes d’aléas.
Dans le monde aujourd’hui tout parait incertain, en tout lieu, à chaque instant ! Tout semble précaire, fragile, illusoire, et osciller entre crainte et vulnérabilité. Il en résulte, outre les références à la catastrophe et au chao, une extraordinaire angoisse de la vie et une incroyable vulnérabilité collective. Or, c’est sur ce terrain de la vulnérabilité que les politiques investissent les imaginaires collectifs, et que les gouvernants déploient les incantations managériales des plus absurdes.
Le monde entier, tous continents confondus, vit depuis le début de la pandémie du COVID – 19 l’une des plus graves crises de son histoire. Cette crise est effectivement grave, non seulement du point de vue de son envergure, cinq continents sur cinq sont touchés, mais aussi du point de vue de son amplitude, car tous les domaines de la vie sociale sont impactés (éducation, santé, culture, économique, environnement, etc.), sans compter les milliers de morts dont le décompte est devenu aussi des plus angoissants.
Mais au stade actuel de l’évolution de la crise, dont on craint depuis quelques jours déjà la transformation en un nouveau cycle de contaminations, on peut déjà se risquer à identifier l’enfantement, par cette crise, de deux (02) bébés sinistres : une crise sociale et une crise économique.
La crise sociale enfantée par cette pandémie a déjà commencé à produire ses effets dévastateurs au niveau des Etats-nations, où les systèmes d’enseignement, de formation et de recherche ont montré leurs limites, les activités sociales et culturelles sont paralysés, et où l’augmentation du nombre de chômeurs et les risques de famine font craindre des nouvelles émeutes de la faim.
La crise économique en cours, engendrée par l’arrêt des appareils de production des Etats, des firmes multinationales et des entreprises publiques et privés, la paralysie des échanges commerciaux, la régression de la demande et de la consommation des biens et services, la montée de l’inflation, la chute des prix de certaines matières premières, dont le pétrole, qui connait son prix le plus bas de ces dernières décennies.
Et a contrario des crises passées, la crise économique actuelle exige aux Etats de rebâtir l’économie mondiale sur les valeurs d’humanité, de solidarité et de justice sociale.
Dr Richard Makon
Chronique précédemment parue à »Mutations »