Lucie Nangno, en service à la cour suprême, est tombée dans les filets de ces hors-la-loi le 9 septembre dernier. Mais la cavale de ses bourreaux a été très éphémère.
Anye Thank God alias « Thank God » (36 ans) ; Vincent Kue (35 ans) ; Cécile Nitcheu alias “Fadimatou” (28 ans) et Rodrigue Cuidja alias “Weah” (38 ans), sont en garde à vue à la division régionale de la police judiciaire de l’Ouest (Drpjo). Tous repris de justice, ils ont été arrêtés dans le cadre d’une enquête ouverte après l’arnaque de Lucie Nangno, greffière en service à la cour suprême à Yaoundé. Les faits remontent au 9 septembre dernier quand Lucie arrive à l’Ouest pour prendre part à une cérémonie funeste. Mais au lieu-dit «agences» à Bafoussam, elle emprunte un taxi immatriculé LT 5381 R ayant pour conducteur Vincent Kue. Dans le véhicule, Cécile Nitcheu, Anye Thank God et Rodrigue Cuidja, avaient déjà pris place comme d’ordinaires passagers. Sauf qu’en chemin, ils vont mettre en branle leur plan, un véritable scénario de film d’arnaque à la camerounaise. Des sources proches du dossier renseignent que, “Fadimatou” qui se présente comme une étrangère, est la première à entrer en scène. Feignant de ne pas connaitre la ville, elle demande au chauffeur de la laisser avec son époux «Thank God», à la gare routière du Nigéria. Après avoir montré son étonnement, ce dernier rétorque qu’il n’existe pas de gare routière du Nigéria à Bafoussam. Toutefois, il lui promet de l’accompagner au point de chargement des cars de transport en commun en partance pour Bamenda. Une nouvelle fois Fadimatou, revient sur la scène exprimer sa peur, parce que dit-elle être porteuse d’une mallette d’argent qu’elle a volée chez son employeur. Dès lors vient le troisième larron, en la personne de “Weah”. Celui qui se présente comme un policier somme le taximan de s’arrêter rapidement s’il ne veut pas être flingué, parce que dit-il, les propos tenus prouvent que les personnes à bord, sont suspectes.
Corruption
Aussitôt sommé, le taximan se gare sans opposer une résistance. Au regard de l’importance quantité d’argent dans la mallette, le policier accepte les pots-de-vin que lui propose l’époux de l’étrangère. Sauf que Fadimatou viendra préciser que l’argent ne peut pas immédiatement être utilisé parce que hanté. Le taximan qui indique avoir déjà aidé une autre personne à purifier ce genre d’argent, se propose d’appeler un puissant marabout. Aussitôt, il fait appel à un certain Roméo (encore en fuite). Arrivé sur le site qui lui a été indiqué, il fait d’emblée savoir que le problème de cet argent n’est pas grave qu’il le pensait. Renchérissant toutefois, qu’afin que sa séance d’exorcisme réussisse, qu’il faut que chacune des personnes présentes dans le taxi aient sa quote-part à la fin. Mais la condition précise-t-il, est que chacun doit se dépouiller entièrement parce qu’au contact de la mallette d’argent hantée, ce qu’ils possédaient ont également porté les fétiches. Le policier est le premier à sortir une somme de 300 000 Fcfa qu’il dépose dans la calebasse du marabout. Les autres suivront, notamment la greffière. Ensuite, le marabout demande à ses clients d’aller chacun se laver le visage dans un cours d’eau, avant de revenir chercher sa part sur l’argent purifié. Sans objection, tous prennent des directions différentes, y compris le taximan qui a laissé son véhicule. Et quand Lucie Nangno revient après s’être pliée à cet exercice, elle est stupéfiée. Car sur le lieu où devait se faire le partage, il n’y a plus personne, ni le taxi. Dès lors, elle se rend compte d’avoir été victime d’une filouterie savamment orchestrée. Dans son sac emporté, il y avait une importante somme d’argent, des objets de valeur et même des documents de la cour suprême. Même le sac de pains qu’elle avait achetés pour sa cérémonie funeste, n’a pas été laissé.
Police judiciaire
Aussitôt, la greffière se rend d’abord à la Drpjo, puis saisi les équipes spéciales d’intervention rapide (Esir) pour porter plainte contre inconnu. Le 10 septembre, les Esir lancent une patrouille dans la zone de prédilection de ces hors-la-loi. Et reconnaissent un véhicule dans lequel ces bandits opèrent et se mettent à le filer. Ayant constaté qu’il était suivi, le taxi suspect dans lequel se trouvait une dame nommée Djomo Sindzé, une victime potentielle qui se faisait cuisiner, amorce une course folle. La chasse à l’homme est lancée. Après quelques minutes de course poursuite, le taxi en question est neutralisé au lieu-dit « Sonel Njemom » et conduit illico presto à la Drjpo. Après des enquêtes, il sera établi que ce gang n’est pas celui ayant dépouillé Lucie Nangno. Toutefois, les membres du gang seront identifiés par d’autres victimes entendues. L’une des complices, une certaine Njie Mary, alias «Marie », court toujours. Et l’exploitation des autres a permis de mettre la main sur ceux qui étaient recherchés dans la ville de Douala.
Arrogance
Visiblement, ces arnaqueurs qui opèrent à visage découvert dans les taxis auraient des soutiens jusque dans les milieux insoupçonnés. D’autant plus que l’enquêteur renseigne qu’ils sont constitués en réseau qui opère de manière rotative dans l’ensemble du pays. Et chaque fois qu’ils tombent dans les mailles de la police, ils ne se font pas prier pour les narguer. De même ces brigands, selon l’enquêteur qui s’est occupé du dossier, ils disent ne pas craindre d’aller en prison. Puisque là-bas, ils ne passeront que très peu de temps.