Richard Makon a convoqué l’histoire. Faisant l’autopsie des manifestations dites pacifiques souvent organisées par des formations politiques de l’opposition à travers le continent dans un chronique parvenue hier à notre rédaction, le juriste estime que manifester pacifiquement au Cameroun ou en Afrique est une chimère. Car rappelle-t-il, ce type d’évènement a toujours tendance à se muer en violences du fait de la nature des revendiquations et du caractère belliqueux propre aux Africains.
Lebledparle.com vous propose ci-dessous l’intégralité de son texte
Qu’on se le dise une fois pour toutes, l’Afrique ne connaît pas ce qu’on appelle manifestations « pacifiques », en l’occurrence celles organisées par l’opposition ou la société civile.
Même lorsqu’elles commencent sous ce rapport, elles finissent quasiment toujours en violence, en emprisonnements et en morts d’hommes.
Il ne s’agit pas là d’une question cognitive, scientifique ou intellectuelle, puisque nombreuses sont les réflexions et les productions intellectuelles africaines sur cette question. On sait donc très bien comment concevoir, organiser et conduire une manifestation dans l’optique de garantir son caractère « pacifique ».
Il s’agit moins aussi d’une question d’opportunité ou de volonté, nombreuses étant les organisations politiques et les responsables politiques qui militent objectivement et sincèrement pour une culture de la manifestation pacifique.
Non, la question est plutôt atavique, psychanalytique, psychiatrique aussi.
Car il s’agit davantage d’un conditionnement des acteurs politiques africains, qui ne peuvent, pour l’essentiel, percevoir, entrevoir et envisager l’activité politique, l’action militante, la mobilisation politique, et les manifestations politiques publiques que sous le signe de la conflictualité.
En d’autres termes, n’envisagent les manifestations qu’à l’aune du rapport de force violent, où la victoire se réalise dans la capacité à museler l’autre, à faire plier et à faire reculer l’autre, généralement à piétiner l’autre, à molester l’autre, à embastiller l’autre, quelque fois à mutiler l’autre aussi, pour qu’il garde les stigmates indélébiles lui rappelant son effrontérie.
Même lorsque les manifestants prônent de bonne foi le « pacifisme », il se trouvera toujours un illuminé ou « un infiltré » pour jeter aux forces de l’ordre la première pierre qui embrasera la rue.
Même lorsque les autorités prétendront vouloir encadrer pacifiquement une marche, il se trouvera toujours un agent des forces de maintien de l’ordre pour « confondre » le portable d’un manifestant avec une arme à feu, et tirer dans le tas, en « légitime défense » dira-t-il.
Et tous les camerounais savent très bien que « les manifestations pacifiques » à venir seront particulièrement violentes. Certains acteurs étant particulièrement conditionnés pour que ça dégénère en combat de rue.
Cette inclinaison morbide, cette inclination mortelle, c’est dans la culture coloniale de violence, de déshumanisation, de dépersonnalisation, d’aliénation qu’elle tire ses origines.
Nous sommes tous des rejetons de la brutalité, des héritiers de la violence, tous autant que nous sommes. Et notre héritage aux générations à venir, si nous n’y prenons garde, ne sera qu’un legs de la violence.
Il n’y a de manifestation pacifique possible que dans une réelle démocratie.
Est-ce pour autant qu’il ne faille pas essayer ? Certainement pas !!!
Toutefois, sans exorcisme collectif les africains en général et les camerounais en particulier auront du mal à se départir de cette culture de la violence qui nous condamne à végéter dans l’obscurantisme.