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Cameroun : A la recherche de Paul Biya, un Prêtre catholique adresse une lettre ouverte à Joseph Dion Nguté

joseph dion ngute

Après son apparition devant l’Ambassadeur de France au Cameroun, le 16 avril 2020, le président de la République reste introuvable. Dans une lettre ouverte paru dans le quotidien « Le Jour » du lundi 11 mai 2020, Ludovic Lado SJ, écrit au Premier ministre pour avoir les nouvelles du Chef de l’Etat.


joseph dion ngute
Joseph Dion Nguté – DR

« Le premier ministre et les membres du gouvernement doivent certes assumer leurs responsabilités en de pareilles circonstances. Mais ce n’est pas suffisant. Nous sommes en régime présidentiel et non parlementaire. Dans un régime présidentiel, c’est le chef de l’Etat qui est le chef d’orchestre et non le premier ministre. Qui a vu Jésus a vu le Père certes mais qui a vu les ministres n’a pas vu le chef de l’Etat. Il n’est pas normal qu’un chef de l’Etat disparaisse pendant un si longtemps de la vue de ses compatriotes sans qu’on ne leur donne de ses nouvelles. Je ne l’ai jamais vu nulle part et les Camerounais ne doivent pas s’y habituer », écrit Jésuite.

Lebledparle.com vous propose l’intégralité de la lettre ouverte.

LETTRE OUVERTE A M. DION NGUTE, PREMIER MINISTRE

Objet : Nouvelles du Président Paul Biya

Excellence M. le Premier Ministre,

Je vous adresse tout d’abord mes salutations citoyennes. Je vous écris pour demander des nouvelles du Président Paul Biya. Où est-il ? Comment va-t-il ? Est-il encore en état de gouverner ? Pourquoi a-t-il disparu de la vue des Camerounais ? Voilà autant de questions que beaucoup de Camerounais se posent au sujet de leur Chef de l’Etat qu’ils n’ont pas vu ou entendu depuis des mois.

Permettez-moi un détour évangélique. Un jour, alors que Jésus s’évertuait à convaincre ses disciples que qui l’a vu a vu le Père, un de ses disciples, nommé Philippe, lui répondit, « Seigneur, montre-nous le Père, et cela nous suffit. » (Jn 14, 8). Excellence Monsieur le Premier Ministre, montrez le Président Paul Biya aux Camerounais qu’il est censé gouverner mais qui ne l’ont pas vu depuis des mois.

Le leadership compassionnel du Chef de l’Etat a surtout manqué aux Camerounais pendant la présente crise sanitaire du COVID-19. Le Cameroun est l’un des rares pays où le Président de la République ne s’est pas adressé directement à ses compatriotes pendant toute la crise. Son absence pendant tout ce temps n’a pas donné de lui l’image d’un bon berger au sens biblique du terme : « Je suis le bon berger. Le bon berger donne sa vie pour ses brebis. Mais le mercenaire, qui n’est pas le berger, et à qui n’appartiennent pas les brebis, voit venir le loup, abandonne les brebis, et prend la fuite; et le loup les ravit et les disperse (Jn 10, 11-13). On peut comprendre que du fait de l’âge du Président qui fait de lui une cible privilégiée de COVID-19, il s’impose un confinement total. Mais les nouvelles technologies permettent aujourd’hui de communiquer avec un peuple sans prendre de risques. Les Camerounais n’ont eu droit qu’aux tweets du ministre de la santé. Le Président Paul Biya a tout simplement disparu, faisant dire à certains qu’il était mort. Et même quand il est apparu à l’ambassadeur de France dans un scenario qui a alimenté beaucoup de polémique, il n’a rien dit aux Camerounais.

Le premier ministre et les membres du gouvernement doivent certes assumer leurs responsabilités en de pareilles circonstances. Mais ce n’est pas suffisant. Nous sommes en régime présidentiel et non parlementaire. Dans un régime présidentiel, c’est le chef de l’Etat qui est le chef d’orchestre et non le premier ministre. Qui a vu Jésus a vu le Père certes mais qui a vu les ministres n’a pas vu le chef de l’Etat. Il n’est pas normal qu’un chef de l’Etat disparaisse pendant un si longtemps de la vue de ses compatriotes sans qu’on ne leur donne de ses nouvelles. Je ne l’ai jamais vu nulle part et les Camerounais ne doivent pas s’y habituer.

Excellence, Monsieur le Premier ministre, je vous prie donc de donner aux Camerounais des nouvelles de leur Président. Si elles sont bonnes qu’il reprenne son bâton de commandement pour diriger le Cameroun. On ne peut pas à un moment aussi critique de ce pays gouverner le Cameroun par procuration. Si les nouvelles ne sont pas bonnes, c’est-à-dire s’il n’est plus en état de gouverner du fait des morbidités normales à son âge, qu’on actionne le mécanisme constitutionnel pour que les Camerounais, par des élections libres et transparentes, se donnent un nouveau Chef de l’Etat plus vigoureux et à la hauteur des défis de l’heure. Monsieur Paul Biya a fait son temps et a tout à fait le droit de prendre sa retraite. Les Camerounais la lui accorderont volontiers avec, comme bonus, une amnistie générale pour lui et sa famille. Être Président de la République n’est pas une punition mais un sacerdoce qu’on ne peut déléguer. Le Cameroun ressemble aujourd’hui à un bateau sans gouvernail, à une voiture sans chauffeur. Ce n’est pas normal.

Que Dieu vous bénisse, Monsieur le Premier Ministre, qu’il bénisse le Président Paul Biya et sa famille, qu’il bénisse tous les Camerounais.

Votre compatriote,

Ludovic Lado SJ


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