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Cameroun : Dans ses discours, Paul Biya très loin de « rentrer au village »

Dans son discours à la jeunesse, le 10 février, le président de la République aux 92 ans bien sonnés, comme le 31 décembre dernier, a une fois de plus, entretenu le suspense quant à sa participation ou non à la prochaine élection présidentielle. À l’heure où les jeunes font face à des défis de plus en plus grands, le chef de l’Etat soutient que sa détermination à les servir demeure intacte et se renforce au quotidien…

Paul BIYA en lunettes
Paul BIYA - DR

A quelques mois du scrutin présidentiel, Paul Biya semble multiplier des coups de communication, voire des galops d’essai pour tester l’opinion. Déjà lors de son discours de fin d’année, au soir du 31 décembre 2024, le chef de l’Etat Paul Biya, 92 ans, n’a pas écarté la possibilité de solliciter le suffrage universel cette année. L’homme qui occupe le fauteuil présidentiel depuis 1982 a déclaré à ses concitoyens, que l’année 2025 sera « pleine de défis ». Et dès lors, a-t-il assuré, «ma détermination à vous servir demeure intacte et se renforce au quotidien, face à l’ampleur des défis auxquels nous sommes confrontés ». S’agit-il d’un acte de candidature ou, comme le soupçonnent certains Camerounais, une tentative de verrouiller les velléités de candidatures avant de présenter son poulain ? En tout cas, lors de son discours à la jeunesse, le 10 février 2025, le président de la République a invité ses jeunes compatriotes à exercer leur droit de vote dans le calme et la paix lors du scrutin d’octobre prochain. « Je comprends votre souhait légitime de voir vos rêves se réaliser et vos conditions de vie s’améliorer. Il est tout à fait naturel que vous attendiez du gouvernement des solutions appropriées aux préoccupations qui vous concernent, et qui sont essentielles à votre épanouissement. Cette année encore, se tiendront, dans notre pays, d’importantes échéances électorales. Ce sera l’occasion pour ceux d’entre vous qui remplissent les conditions légales, d’exercer librement leur devoir citoyen. Il vous appartiendra, le moment venu, de faire votre choix en toute responsabilité, dans le calme et la sérénité », a déclaré Paul Biya, sans toutefois se priver de tacler aussi ses adversaires politiques : « Je vous demande […] de ne pas prêter l’oreille aux sirènes du chaos que font retentir certains irresponsables, a-t-il enchaîné. Ne les laissez pas se servir de vous pour assouvir leurs desseins pernicieux, à savoir créer le désordre dans notre cher et beau pays. Ne vous laissez pas non plus endormir par les promesses fallacieuses et pour la plupart irréalisables qu’ils essayent de vous vendre », a-t-il poursuivi.

Enfin, comme lors de son adresse du Nouvel An, le 31 décembre dernier, lors de laquelle il avait dit que sa « détermination à servir [était] intacte », le président camerounais s’est une nouvelle fois projeté en déclarant notamment : « Je continuerai d’être à vos côtés pour relever les défis auxquels vous êtes confrontés ». Des propos qui ne sont pas passés inaperçus, quelques semaines seulement après la longue absence de Paul Biya du Cameroun qui avait suscité inquiétudes et fausses nouvelles sur son état de santé, à l’automne dernier.

Sans perspective de retraite

Paul Biya fête ses 92 ans ce 13 février 2025. Parvenu au pouvoir après la démission d’Ahmadou Ahidjo, le premier dirigeant camerounais après l’indépendance, l’ancien séminariste est à la tête du pays depuis le 6 novembre 1982. Une longévité célébrée dans tout le pays à grand renfort de discours. Ici et là, ses partisans plaident pour qu’il brigue un autre mandat, gage de « stabilité » et « sécurité ». Du point de vue politique, Paul Biya reste le candidat naturel du parti au pouvoir, le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc), et rien ou presque ne semble entamer la détermination de ses partisans. Mais, comme toujours, le principal intéressé ne se prononce pas encore. Dans un discours à la nation, le député Cabral Libii, président du le Parti camerounais pour la réconciliation nationale (Pcrn) a invité le chef de l’Etat à prendre sa retraite politique. « Monsieur le Président de la République, je pense, comme la plupart des Camerounais, qu’il est temps d’aller vous reposer avec tout le respect dû à votre statut de père et de chef’ » , a déclaré Cabral Libii. Plusieurs évêques camerounais se sont également prononcés lors des célébrations du Nouvel An. Avant de clore son homélie, l’évêque Barthélemy Yaouda de Yagoua termine en disant : « on ne va pas souffrir plus que ça encore. On a déjà souffert. Le pire ne viendra pas. Même le diable qu’il prenne d’abord le pouvoir au Cameroun, et on verra après.» Selon ceux-ci, le gouvernement de Biya nuit dangereusement au droit de parole libre des Camerounais et il serait temps de laisser sa présidence à de nouveaux candidats. Mais pour le secrétaire à la communication du Rdpc, Jacques Fame Ndongo, rien n’empêche le président Biya à briguer un nouveau mandat.

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Les soutiens et les appels à candidature

Paul Biya bénéficie des soutiens et les appels à candidature qui se multiplient en sa faveur. Récemment les membres du conseil national des chefs traditionnels, les autorités religieuses des régions de l’Adamaoua, du Nord et de l’Extrême-nord ainsi que les imams des mosquées centrales de Douala et Yaoundé, ont officiellement appelé à une candidature du président Paul Biya. Le choix des chefs traditionnels de 1er, 2ème et 3ème degré du Cameroun émane de plusieurs raisons énoncées lors de la récente réunion du bureau exécutif tenue le 27 janvier dernier en présence du ministre de l’Administration territoriale. Le conseil des chefs traditionnels, dans sa déclaration, a mis en avant des qualités indéniables et irréfutables du président de la République. Ils ont souligné son expérience, sa sagesse, et son patriotisme comme atout majeur pour diriger le Cameroun. Ils ont également évoqué les efforts constants du président de la République vis-à-vis de la paix au Cameroun, l’attention particulière qu’il accorde aux chefs traditionnels à travers des nominations aux responsabilités diverses, à l’instar du poste de vice-président au Conseil régional. Quoi de plus pour ces gardiens de la tradition de réitérer leur engagement à soutenir la prochaine échéance électorale, pour qu’elle se déroule dans de bonnes conditions.

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Le choix des certains partis politiques

Au lendemain de cet appel, quelques partis politiques vont demander à leur tour à Paul Biya d’être candidat au prochain scrutin. Il s’agit de: l’Union des populations du Cameroun (Upc) sous la conduite de Robert Bapooh Lipot, le Mouvement pour la défense de la République (Mdr) sous la présidence de Daïssala Tigana Tassi, le Parti camerounais pour la réconciliation nationale (Pcrn) conduit par Robert Kona, le Parti des républicains et agriculteurs du Cameroun (Prac) dont le leader est Jean Jacques Mbogol III. Pour ces formations politiques, la riche expérience et le sens élevé de l’État dont fait montre Paul Biya, sont incontestables. « Face aux défis et enjeux actuels, le parti historique rassure le peuple camerounais en confirmant que, l’avenir du Cameroun est avec Paul Biya », souligne ainsi l’Upc dans sa synthèse de déclaration. En ce qui concerne le Mdr, « le président Paul Biya est à mesure de garantir la stabilité et la prospérité du Cameroun. Son expérience, sa sagesse et son engagement pour le développement du Cameroun font de Paul Biya le meilleur choix et le meilleur pari pour la sauvegarde de l’unité nationale ». Le Pcrn voit en Paul Biya une « bénédiction de Dieu » pour le Cameroun. « Il n’est pas question pour nous de nous lever aujourd’hui pour combattre ce que Dieu a choisi. La victoire est pour notre candidat Paul Biya », a confié Robert Kona. Dans cette optique, le Prac, s’engage à accompagner le chef de l’État dans son élan de développement et de transformation du Cameroun. « Ça fait 40 ans que nous sommes dans une opposition stérile dans le Nyong-et-Ekelle », a déploré le président national de ce parti, Jean Jacques Mbogol III. « Il est temps de s’allier avec le président de la République, le père de la nation. Paul Biya est une assurance tout risque pour le Cameroun », a-t-il conclu. Il est clair que ces soutiens constituent des atouts significatifs pour une éventuelle candidature de Paul Biya à l’élection présidentielle 2025. Surtout que les espoirs d’une coalition d’opposition solide contre les 42 ans de règne de Biya avant l’élection présidentielle d’octobre 2025, s’amenuisent de plus en plus.


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