Tous ont excédé leur mandant à la tête des sociétés qu’ils dirigent et ne sont pas remplacés par le Président de la République qui les a nommés depuis belle lurette.
Selon la loi du 22 décembre 1999 portant statut général des établissements publics et des entreprises du secteur public et parapublic, en son article 47, «le Directeur général, et s’il y a lieu, le Directeur Général Adjoint sont nommés à la majorité des 2/3, par le conseil d’administration sur proposition de l’actionnaire majoritaire ou unique pour une durée de trois ans renouvelable deux fois. Soit une durée ne pouvant excéder neuf ans à la tête d’une entreprise publique».
Une disposition qui semble avoir perdu tout son sens aux yeux de celui qui l’a promulgué et qui est, en premier, chargé de la faire appliquer la respecter, fait savoir Mutations dans son édition du 3 août 2016. Le journal dresse le portrait de ces Directeurs Généraux qui battent les records de longévités à leur poste. Certains sont d’ores et déjà dans le viseur de l’Opération Epervier.
Adolphe Moudiki, ADG de la Société Nationale des Hydrocarbures
Il trône à la tête de la Société Nationale des Hydrocarbures (SNH) depuis 1993. Soit 23 ans sans interruption dans la gestion du pétrole camerounais. Ressource au combien stratégique dans l’équilibre économique et même politique du pays. Bien que physiquement diminué, l’homme reste un personnage clé du système Biya et garde une influence certaine dans le cercle des décisions importantes. Les acquisitions de l’avion présidentiel et du bateau (Rio Del Rey) l’ont mis au-devant de la scène comme étant le principal fournisseur des devises pour les dépenses hors budget. C’est le même Adolphe Moudiki qui s’est opposé à la nomination de son plus proche collaborateur Bernard Bayiha à la tête du Chantier Naval et Industriel du Cameroun dont la SNH est l’actionnaire majoritaire. Ceci malgré le décret présidentiel entérinant cette nomination souhaitée par le Ministre des Transports de l’époque, Robert Nkili. Sa requête arguant son souhait de garder Bernard Bayiha auprès de lui a finalement fait plier les autorités qui ont fini par nommer Alferd Forgwei Mbeng à la tête du CNIC.
David Ekotto Emane, Directeur Général de la CAMTEL. Le bon réseau
C’est le 24 février 2005 que David Ekotto Emane est porté à la tête de la Cameroon Telecommunication. Onze ans déjà. Ingénieur en informatique, c’est en 1990 qu’il arrive dans cette entreprise. Il gravit tour à tour les échelons, et après un bref séjour à la Caisse Nationale de Prévoyance Sociale, il fait son come-back à Camtel pour prendre les rênes de la boite. Chargé de la restructuration de l’entreprise, son nom fait son apparition dans les affaires au Contrôle Supérieur de l’État et au Tribunal Criminel Spécial. Un ramdam qui n’émeut outre mesure la haute hiérarchie qui continue malgré le caractère illégal de sa longévité à le maintenir à la tête de la plus importante société publique de télécommunication de l’Afrique Centrale. Chargé aujourd’hui de l’un des plus gros chantiers des projets structurants, poser la fibre optique sur l’ensemble du territoire national, David Ekotto Emane doit aussi, et ce depuis quelques mois, cohabité avec une mission du CONSUPE qui a décidé de passer sa gestion au scribe.
Yaou Aissatou, DG DE LA SNI. La discrétion qui paye
C’est en septembre 2003 qu’un décret du Président de la République porte Yaou Aissatou aux commandes de la Société Nationale d’Investissement. Entreprise dans laquelle elle a passé une bonne partie de sa vie administrative. Comme autre occupation administrative, un passage au Gouvernement d’une certaine durée. En effet, c’est le 3 novembre 1975 qu’elle entre à la SNI et occupe le poste de Directeur adjoint Chargé des Finances. Le 4 février 1984, elle est nommée Ministre de la Condition Féminine et quelques années après, Ministre des Affaires Sociales et de la Condition féminine. Le 18 mai 2000, après sa sortie du Gouvernement, elle revient à la SNI avec le grade de Fondé de pouvoir principal. Bon an mal an, la présidente du bureau national de l’Organisation des femmes du RDPC va se fondre dans une discrétion qui lui est reconnue dans l’anonymat des privilégiés du pouvoir qu’on voit très peu et dont on ne parle presque jamais. Jusqu’à ce qu’arrive le TCS et ses convocations. Des ennuis que certains disent être liés à sa proximité supposée au réel avec le Ministre d’Etat Marafa en détention au SED. Quoi qu’il en soit, «l’étoile de la Bénoué» cumule à ce jour 13 ans à la tête d’une entreprise d’État, jadis au centre du système des privatisations à une époque doyenne du Gouvernement. Il n’est pas exclu qu’elle réédite cet exploit au poste de DG.
Michaël Ndoping, DG de l’Office Nationale du Cacao et du Café. La fève rare ?
C’est le 30 janvier 2006, plus de 10 ans aujourd’hui que Michaël Ndoping, Inspecteur principal des impôts et ex-chargé des missions à la Présidence de la République, est installé comme Directeur Général de l’Office Nationale du Cacao et du Café. Il lui est assigné la mission de ramener de l’ordre dans le secteur libéralisé des cultures de rente dont il devait aussi définir un plan de relance de la culture. Les exploitants du secteur qui à chaque campagne nourrissent des griefs contre l’ONCC trouveront à coup sûr à redire. Toujours est-il que l’homme est à la tête de ce qui fut jadis la principale source de devises du Cameroun est presque invisible. Ses actions parlent seulement pour lui et le défi de la relance de la production nationale au niveau de la fin des années 80 reste et demeure un vaste chantier. En un peu plus de 10 ans, le cacao et le café camerounais peinent toujours à retrouver leur qualité et leur saveur d’antan. Pour ce secteur qui passait avant celui du pétrole il y a encore une trentaine d’années, en ce qui concerne l’apport au BIP, il est sans doute tant de revoir la politique et les hommes en charge de son application.