Ils sont de plus en plus nombreux à faire des petits métiers pour assurer frais de scolarité, loyer, nourriture et soins
Étudier et faire des petits métiers. Tel est le quotidien de bon nombre d’étudiants camerounais. En effet, face aux difficultés de la vie, ces derniers sont parfois obligés d’allier études et travail pour subvenir à leurs besoins, notamment, frais de scolarité, loyer, nourriture, achat du matériel didactique etc. Un tour au campus de l’Université de Yaoundé I, a permis de rencontrer des étudiants, qui, pour certains, se sont lancés dans divers métiers depuis plusieurs années. D’autres par contre ont pris des initiatives personnelles. C’est par exemple le cas de Christian Fogaing, étudiant en Master II en filière géographie. Grâce aux différents séminaires sur les procédés de fabrication du savon, il a fini par mettre sur le marché un savon liquide nommé « Frel » qui constitue aujourd’hui sa principale source de revenus. « Mes parents ne sont pas à Yaoundé. Ils font les efforts pour payer mon loyer. A un moment, je me suis rendu compte que j’étais toujours en train de tendre la main lorsqu’il fallait résoudre mes problèmes personnels, et ça devenait embêtant. J’ai donc décidé de fabriquer le savon liquide, puisque j’avais eu à faire des petits séminaires dans ce sens. Je vends une bouteille plastique d’un litre à 175 FCFA et ma cible ce sont les étudiants du quartier Bonamoussadi où j’habite. Je parviens à me faire un bénéfice hebdomadaire de 3000 FCFA, ce qui me permet de vivre aisément, de payer mon taxi lorsqu’il faut faire des descentes sur le terrain dans le cadre de mes recherches et parfois d’aider mes frères et sœurs lorsqu’ils sont dans le besoin »,explique Christian Fogaing.
Comme ce dernier, Ibrahim Ballo ne se contente pas seulement de poursuivre son cursus académique en sociologie. Après la mort de ses parents en décembre 2015, il a été obligé de chercher le travail dans une petite imprimerie, avec pour seul objectif de se battre pour un jour réaliser son rêve. « Mes parents sont décédés le même jour dans un accident de la circulation à Koutaba. Ils étaient mon seul soutien. Dans ma famille, il n’y a personne pour me soutenir. Ne pouvant rester les bras croisés, je me suis lancé à la recherche d’un petit boulot pour subvenir à mes besoins et payer ma chambre. Finalement j’ai trouvé le travail en tant que façonneur dans une petite imprimerie au Cradat où je perçois 30 000 FCFA par mois. Je me battrais toujours ainsi pour financer mes études universitaires car je rêve d’être un jour professeur titulaire en sociologie», confie Ibrahim Ballo en soulignant son admiration pour Valentin Nga Ndongo, un enseignant qu’il prend pour modèle.
Les étudiantes ne sont pas en reste dans cet élan. Nous sommes le samedi 18 juin 2016. Il est 19 h au lieu-dit école des postes à Yaoundé. Une jeune fille, la vingtaine à peine dépassée, s’occupe en vendant des beignets, bouillie, haricot. Sa marchandise attire bien des étudiants. « Je suis étudiante en biologie végétale niveau II à l’Université de Yaoundé I. Je mène cette activité depuis un an pour amortir les dépenses de mes parents. J’ai un bénéfice de 1500 FCFA environs les jours où je vends puisque je ne viens pas ici quand j’ai cours en soirée », affirme Christelle Abéga.
Ces étudiants qui allient études et petits métiers s’organisent d’une manière particulière. « Ils fonctionnent suivant leurs emploi de temps, en fonction des activités à mener. Ceux qui ont cours le matin mènent leurs activités dans l’après- midi et ceux qui ont cours dans l’après -midi mènent leurs activités le matin. Cependant ceux qui travaillent à plein temps procèdent par photocopie des cours et viennent juste le jour de la composition », explique un enseignant d’université qui a souhaité garder l’anonymat
© Hervé Fopa Fogang, Quotidien de l’Economie