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Cameroun: Marafa rompt le silence – «Même si les coups sont rudes je continuerai à publier mes lettres»

    

On a longtemps attendu la 5ème lettre de Marafa Hamidou Yaya, ancien Secrétaire général de la présidence de la République puis ancien ministre d’Etat en charge de l’Administration territoriale et de la décentralisation,

aujourd’hui pensionnaire de la prison secondaire de Yaoundé, logée au camp Yeyap du Secrétaire d’Etat à la Défense (gendarmerie). Le voici plutôt dans une longue interview accordée à Assane Diop, ancien journaliste de Rfi aujourd’hui collaborateur de Slate Afrique.

Interpelé le 16 avril 2012 par le juge d’instruction Pascal Magnaguemabe et mis sous mandat de dépôt à la prison centrale de Kondengui à Yaoundé, Marafa Hamidou Yaya a été condamné le 22 septembre 2012 à 25 ans de prison pour complicité de détournement de fonds avec le golden boy Yves-Michel Fotso, ancien administrateur-directeur général de la Camair, son « ami » de longue date et d’autres.Il faut relever que Marafa Hamidou Yaya est le tout premier « client de « l’Opération épervier » à être jugé en moins de six mois pendant que d’autres moisissent en taule pendant trois, quatre, cinq ans avant de voir commencer leur procès. Un véritable privilège pour ce notable de Garoua qui, durant ses longues années de service dans la sphère décisionnelle aura été, comme il l’avoue d’ailleurs à Assane Diop, l’un des artisans du système qui le broie aujourd’hui. Il s’est surtout illustré depuis sa mise en détention par une activité épistolaire qui, selon les observateurs, a mis le régime Biya à mal en révélant certains dossiers sensibles dont celui du crash de l’avion de la Camair en décembre 1995 dont les victimes ne sont toujours pas indemnisées. Contrairement aux affirmations du gouvernement. C’est sans doute pour le réduire au silence qu’il a été extrait de la prison centrale de Kondengui pour la prison secondaire du camp Yeyap d’où il a trouvé encore le moyen de lancer un autre pavé dans la mare avec cet entretien accordé à Assane Diop. Il mainitent qu’il continuera la publication de ses lettres. « Les suivantes sont prêtes. Elles ne viseront pas à détruire, mais à construire. Chacun des thèmes qu’elles abordent vise à servir le débat politique », avertit-il. Lisez plutôt.

© Doo BELL

Marafa Hamidou Yaya: «Même si les coups sont rudes je continuerai à publier mes lettres»

Le verdict remonte au samedi 22 septembre dernier. Vous avez été condamné à 25 ans de prison pour un délit que vous avez toujours nié avoir commis. Dans quel état d’esprit êtes-vous?

D’abord, je me sens serein et la conscience tranquille. Je sais que je suis innocent, mais le tribunal le sait aussi et l’a reconnu. Lisez le verdict, vous n’y trouverez aucune trace de détournement de fonds ou de recel. Aucune tâche sur mon honneur et ma probité. Ensuite, et surtout, je reste déterminé à mener le combat. Pas un combat personnel entre deux individus qui seraient l’actuel chef de l’Etat et moi. Non, la lutte, décisive, est pour que la justice reste ou redevienne garante de notre liberté à tous et ne soit plus mise à la botte du régime actuel. Il en va de l’avenir de notre pays. Je reçois de mes compatriotes, un soutien qui se renforce depuis ma condamnation. L’espoir qu’ils placent en moi me donne la force et soustrait du temps immobile de la prison. Je suis tourné vers les changements qui doivent et qui vont advenir.

Mais si personne, pas même le tribunal, ne vous croit coupable, pour quoi avez-vous été condamné?

Tout ce qu’il a trouvé pour me condamner est un fait de complicité « intellectuelle ». Pour cela, il s’est fondé uniquement sur ma relation amicale avec un des coaccusés au moment des faits. J’assume cette amitié transformée en charge, mais elle ne rend coupable d’aucun crime ni délit.

On vous soupçonne de vous être enrichi illégalement au pouvoir. Etes-vous un homme riche?

Par rapport à la moyenne de nos compatriotes, oui. Je suis un homme riche puisque mes revenus sont supérieurs à mes dépenses. Je ne mène aucune vie ostentatoire. Une attitude qui s’impose à toute ma famille. Nos dépenses sont conformes à nos besoins. Je déplore que ce ne soit malheureusement pas le cas de beaucoup de Camerounais. Par rapport à mes camarades qui ont choisi le privé, comparaison que j’ai eu évidemment souvent l’occasion de faire, clairement non. Et c’est bien ainsi. Mon patrimoine est connu. Je l’ai acquis, et il est aisé de le vérifier, en ayant essentiellement recours à des prêts bancaires, que j’ai remboursés grâce à mon traitement de ministre et à mes jetons de présence comme président du conseil d’administration de sociétés publiques.

Revenons sur l’affaire de l’avion présidentiel « l’affaire albatros ». Vous ne vous reconnaissez donc aucune responsabilité dans ce dossier?

Non, aucune. J’ai déjà dit que le tribunal ne m’a trouvé coupable d’aucune malversation. Permettez-moi d’être plus détaillé, et de vous dire quelles ont été ses réponses aux questions essentielles suivantes: ai-je pris l’initiative de commander cet avion? Non. Ai-je pris la décision, ou ai-je été informé préalablement de la décision, de virer 31 millions de dollars à la société retenue au lieu d’émettre une lettre de crédit comme c’était prévu ? Non. Ai-je pris l’initiative ou ai-je décidé de commander un autre avion que celui initialement prévu? Non. Ai-je participé de près ou de loin à l’accord par lequel l’État du Cameroun et le vendeur se sont entendus pour solder cette affaire, et par lequel les deux parties renonçaient à toutes poursuites ultérieures? Non. Enfin, y a-t-il trace d’une somme d’argent que j’aurais reçue dans le cadre de ce dossier? Non. Vous voulez mesurer à quel point les accusations portées contre moi sont grotesques ? Un mois à peine après ma condamnation, mon successeur au Secrétariat général à la Présidence de la République, a été condamné, et pourquoi? Pour avoir tenté de détourner ces mêmes 31 millions de dollars qui sont censés déjà avoir été dérobés!

En voulez-vous aux juges ou aux puissants qui vous ont condamné?

Je ne peux pas en vouloir aux magistrats. Les juges étaient sous la pression du régime, ils ont cédé. Comment exiger d’eux un courage dont nous-mêmes, nous ne faisons pas toujours preuve ? Quant aux autres, ni pardon, ni blâme. Chacun est libre de se déshonorer mais doit en porter la responsabilité. Un proverbe dit : « Le sot ne pardonne rien et n’oublie rien, le naïf oublie et pardonne, le sage pardonne, mais n’oublie pas.» Je fais le choix de la sagesse.

Vous dites « sage », c’est- à-dire dépassionné, mais à la sortie du tribunal vous vous êtes déclaré : » déçu, mais pas vaincu ». N’était-ce pas du ressentiment?

Nullement ! Je me souviens de ce spectacle pathétique donné par le principal témoin de l’accusation, un ancien ministre des Finances, transpirant de peur, car il avait pour instruction de m’accabler et que, malgré ses efforts pour tordre la vérité, il ne pouvait que me disculper des principales charges contre moi. D’ailleurs, cette condamnation n’est pas une défaite pour moi, mais l’échec d’une volonté du pouvoir de me mettre à mort politiquement. Ils en sont réduits à des expédients pour assurer leur fragile survie politique. La peur est de leur côté. Pas du mien. Je n’exagère pas en disant que moralement, émotionnellement et intellectuellement, je suis en pleine forme. Ne donnez aucun crédit aux ragots qui me disent déprimé et suicidaire.

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Craignez-vous pour votre vie?

Je ne suis pas craintif de nature, mes lettres ouvertes l’ont démontré. Cependant, je sais que ma vie est menacée. Depuis 5 ans certains ont programmé mon élimination physique immédiate en cas de vacance du pouvoir. D’autres demandent ma déportation à la prison de Yoko, ce qui vaut aussi condamnation à mort, mais à petit feu.

Depuis 5 ans, dites-vous. À quoi correspond cette date ? Qui sont ces gens qui vous en veulent à ce point?

La date correspond au lendemain des élections législatives de 2007. À ce moment, certains hommes politiques ont commencé à se projeter, légitimement, dans l’après-Biya. D’autres, tapis dans l’ombre, les ont vus comme des adversaires dangereux. Je les inquiétais particulièrement. Il fallait se débarrasser de moi. « Vous voulez savoir ce que vos ennemis ont à se reprocher ? Voyez de quoi ils vous accusent pour vous salir, » dit le proverbe. Dans un premier temps, ces campagnes n’ont affecté en rien la confiance que me témoignait le chef de l’Etat. Mes accusateurs de l’ombre ont inventé alors, une variété de scenarios absurdes: j’avais levé une force armée prête à fondre sur la capitale, ou par ambition personnelle j’avais décidé de me présenter contre le Président en 2011, ou j’étais le pion des États-Unis et de la France qui avaient décidé de l’écarter du pouvoir. Tout cela veut dire trois choses: d’abord, évidemment, mon procès est politique. Ensuite, il a commencé dès 2008, au lendemain de la modification de la Constitution ouvrant la voie à une nouvelle candidature du président Biya, car il a fallu préparer l’opinion publique à ma condamnation. Enfin, c’est le jour de mon arrestation, le 16 avril 2012, que le verdict a véritablement été rendu. Ce qui a suivi n’était que pour la forme.

Si vous pressentiez tout cela, pourquoi ne pas avoir démissionné, voire quitté le pays, avant votre arrestation?

Certains responsables, à des niveaux insoupçonnés, m’avaient proposé de me faire quitter le pays. D’ailleurs, je m’interroge encore sur la sincérité de leur démarche. Mais j’ai fait le choix de rester car je voulais m’expliquer devant la Justice sur cette affaire complexe qui mettait en cause mon honneur.

Quelles étaient vos relations avec Paul Biya?

C’est un homme mystérieux. De mon point de vue, nos relations ont toujours été bonnes : confiantes, franches, mais limitées à la sphère professionnelle. Il m’a confié de très importantes responsabilités et fonctions auxquelles je n’ai objectivement jamais failli.

Comment expliquez-vous son revirement à votre égard?

Je ne cherche pas d’explications. Mon regard se porte vers l’avenir, et, dans cette perspective, je ne pense, pas à lui. Ma seule crainte pour mon pays est que le chef de l’État ne soit pousser à prendre des décisions de plus en plus mauvaises pour le bien commun, et mon affaire en est une illustration. Un jour sûrement ils finiront par se débarrasser de lui.

Vos propos semblent dégager le président Biya de toute responsabilité dans la gestion des affaires du pays, et dans la vôtre en particulier. Ce serait surprenant.

Non, pas du tout, je ne l’exonère pas. Seulement, alors que tout le monde s’accorde pour reconnaître en lui un habile politicien, il pose désormais des actes qui ne lui ressemblent guère, et qui plongent notre pays dans une situation de tension sans précédent depuis 1984. Il ne semble donc pas avoir les mains libres. Ce qui est déjà une faute extrêmement grave, il est vrai.

Le Cameroun vient de fêter le trentième anniversaire de l’accession au pouvoir de Paul Biya. Quel regard portez-vous sur cette période?

Il vous suffit de lire la presse locale et internationale pour constater qu’elle est assez unanime pour parler d’échec. Pour ma part, je parlerai plutôt d’erreurs: à chaque fois, au cours de ces 30 ans, que Paul Biya a eu à choisir entre la modernisation politique et économique de notre pays, avec les risques de perturbations inhérents à cette démarche, et l’immobilisme garant, selon lui, de la paix civile, il a choisi l’immobilisme. C’est ce qui fait que nous avons aujourd’hui un pays au bord de conflits sociaux et politiques sans précédent.

Que représente aujourd’hui Paul Biya pour le Cameroun et pour vous?

Paul Biya a été le symbole d’une transition politique pacifique en 1982. Aujourd’hui, on attend qu’il en soit le garant.

Que voulez-vous dire? Souhaitez-vous qu’il se démette de ses fonctions comme le président Ahidjo?

Libre à lui de le faire. Mais là n’est pas mon propos. Le monde a changé depuis 1982, il n’appartient pas au président de la République de désigner son successeur. En 1982, peu de gens connaissaient l’actuel président, mais les Camerounais étaient si heureux et fiers de cette transition pacifique que tous, moi le premier, lui ont apporté leur soutien. Aujourd’hui, nous attendons avant tout de lui qu’il mette en place les institutions politiques qui assureront une succession pacifique et démocratique lorsqu’il quittera le pouvoir. Or, rien n’est en place, ce qui expose notre pays à de multiples dangers.

Croyez-vous à un risque de guerre civile dans votre pays, où les tensions ethniques sont grandes?

Non, ce risque est faible. Cependant, certains pompiers pyromanes agitent le spectre d’une guerre ethnique, comme au Rwanda, tout en créant dans l’ombre une situation propice à une prise ou un maintien du pouvoir dans les mains d’une même clique. De fait, ils sont les maux dont ils prétendent être le remède. Je sais que notre unité nationale est encore fragile. Depuis la fin de la guerre froide, en Afrique comme ailleurs, on constate des replis identitaires sur des bases non seulement ethniques, mais aussi religieuses, linguistiques et culturelles, générationnelles, et selon le clivage monde rural/monde urbain. Ces lignes de rupture potentielle peuvent en effet menacer le pacte républicain, mais cela ne peut en aucun cas justifier l’immobilisme politique et économique. Au contraire, le meilleur remède contre le risque de guerre civile, c’est l’initiative et l’action.

Pourtant le gouvernement vient de lancer un programme de grandes réalisations. N’est-ce pas une forme d’action?

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Soyons sérieux un moment. Qui peut croire à la construction d’une nouvelle raffinerie à Kribi, ou à la construction d’une voiture « made in Cameroun » en 2013? C’est une politique de grandes illusions, pas de grandes réalisations. Ces projets sans aucune pertinence économique ne trouveront pas d’investisseurs, et ils ne servent qu’à masquer une incapacité à mener à bien les vrais projets importants tels que le Pont sur le fleuve Wouri. Les populations et les opérateurs économiques l’attendent depuis plus 20 ans. Que le gouvernement crée déjà les 25 000 emplois jeunes promis par l’actuel chef de l’Etat, qu’il mette fin aux pénuries d’eau et d’électricité, et il gagnera en crédibilité !

Mais, vous avez vous-même exercé de hautes fonctions au gouvernement. Vous sentez-vous une part de responsabilité dans cet échec?

Je vais répondre à votre question par des questions. Suis-je fier d’avoir sauvé l’organisation des élections législatives et municipales de 2002 dont l’impréparation nous menait droit aux émeutes? Suis-je fier d’avoir oeuvré pour une amélioration sensible du processus électoral vers plus de transparence? Suis-je fier d’avoir amorcé, en dépit de toutes les entraves et résistances, le processus de décentralisation indispensable à la modernisation de notre pays? Ai-je avec insistance attiré l’attention du chef de l’Etat sur la nécessité d’engager des réformes institutionnelles et économiques? Mais je ne veux pas revenir sur le passé. Seul importe l’avenir, et pour le construire, mon expérience peut utilement servir mon pays.

Qu’est-ce qui pourrait, selon vous, remettre votre pays sur le chemin de la croissance?

Le projet dont je suis porteur est fondé sur l’idée d’une société de confiance. Confiance en soi que la nation doit retrouver, et confiance des citoyens entre eux. Sans cette confiance, la reconstruction de notre pays sera impossible.

Pourquoi parler de reconstruction? N’est-ce pas excessif?

Non. Il s’agit de cela et de rien de moins que cela. Depuis 25 ans, les investissements, exception faite du secteur des mines et de l’énergie, sont en chute libre. L’accès à l’eau, à l’électricité, aux soins médicaux est de plus en plus difficile. L’environnement naturel a dans certaines régions été saccagé, dans d’autres la pollution augmente dangereusement. Tout cela dans un contexte où la corruption ne cesse de progresser. Mais le préalable à cette reconstruction, j’insiste sur cette dimension qui peut sembler abstraite mais qui ne l‘est pas du tout, c’est que nous retrouvions confiance en nous.

Or, aujourd’hui, c’est le règne de la méfiance. On se méfie du voisin qui n’est pas de son ethnie, on se méfie du douanier, du policier, de l’inspecteur des impôts, de l’examinateur, du médecin, de la presse, des résultats des élections, de la justice, de l’Etat. Reconstruire la confiance pour reconstruire le pays, voilà la route que doit prendre le Cameroun.

Ce projet politique, comment comptez-vous le conduire? Comment envisagez-vous la suite?

Nous avons entrepris avec mes avocats de faire appel du jugement. Nous avons la volonté d’épuiser tous les recours de droit. Cependant, je ne me laisserai pas enfermer dans la sphère judiciaire. Elle est secondaire par rapport au combat politique, que je poursuivrai sans relâche.

Continuerez-vous à publier vos lettres?

Pensez-vous que je prendrais une position si forte pour finir par dire, piteusement, à mes adversaires : « Si vous cessez de dire des mensonges sur moi, eh bien, je m’abstiendrai de dire la vérité sur vous. » Je ne crains rien. Même si les coups sont rudes. Je continuerai à publier mes lettres. Les suivantes sont prêtes. Elles ne viseront pas à détruire, mais à reconstruire. Chacun des thèmes qu’elles abordent vise à servir le débat politique.

Comptez-vous sur le soutien de la France et des Etats-Unis, deux pays avec lesquels, dit-on, vous entretenez de bonnes relations? Il semble que François Hollande n’ait pas évoqué votre cas avec Paul Biya lors de leur entretien à l’occasion du sommet de la francophonie à Kinshasa.

Je souhaite ardemment que ces deux grandes nations accroissent le soutien qu’elles apportent à mon pays. Le Cameroun a besoin de développer massivement ses infrastructures, d’accroître ses capacités de production industrielle et agricole, et tout ceci en préservant son environnement. Tout cet effort ne peut être supporté par la seule coopération sino-camerounaise! Les États-Unis, la France, l’Allemagne, le Japon et bien d’autres pays peuvent développer avec le Cameroun des partenariats profitables. Y compris sur les droits de l’homme, thème largement évoqué lors du sommet de la Francophonie organisé à Kinshasa en octobre 2012. Pour mon cas personnel, je ne demanderai jamais à une puissance étrangère d’intervenir dans une lutte qui ne peut et ne doit être menée que de l’intérieur. Oui à une coopération ouverte bénéfique à notre pays, non à une pression de l’étranger dans des questions et des processus intérieurs.

Demandez-vous aux juges d’enquêter sur les récentes révélations sorties dans la presse camerounaise concernant un éventuel enrichissement frauduleux de Franck Biya grâce à des opérations sur des Obligations du Trésor camerounais?

Je suis consterné par cette histoire. Je dois dire que rien, dans le souvenir que je garde de certains protagonistes de cette affaire, ne me permet de penser qu’ils aient pu commettre cela. Ce que ces révélations m’évoquent, c’est la pensée de Cicéron : « Une nation peut survivre à ses fous, et même à ses ambitieux. Mais elle ne peut survivre à la trahison venant de l’intérieur.  » L’enjeu de cette affaire justifie en lui-même une enquête. La vérité sur l’existence ou non d’une trahison de l’intérieur sera très simple à établir, les Camerounais méritent de la connaitre.

Quelles sont vos conditions de vie en prison?

Reposez-moi la question dans 24 ans. Peut-être, alors, me préoccuperai-je de mes conditions de détention au regard des droits de l’homme. Mais d’ici là, je me battrai non pas sur les conditions, mais sur le principe même de ma détention. Se préoccuper de mes conditions de détention, sans se poser la question du fondement même de mon incarcération, ceci au nom de la force de la chose jugée, de la soi-disant « complexité de l’affaire », ou encore du « pas de fumée sans feu », c’est une façon de se donner bonne conscience, et de se laver les mains de cette affaire qui engage, au-delà de moi, l’avenir de mon pays. Le premier des droits de l’homme, c’est le droit à une justice équitable, c’est la liberté pour l’innocent, et non pas le droit à une cellule confortable!

Propos Receuillis Par Assane Diop (SlateAfrica)


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