L’artiste comédien, metteur en scène et écrivain Wakeu Fogaing est mort la nuit de lundi à l’hôpital protestant de Mbouo Bandjoun. Le comédien, dramaturge, metteur en scène et écrivain à l’âge de 53 ans, vaincu par la maladie.
Maurice Kamto, Homme Politique Camerounais et Président National du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun a tenu à lui rendre un vibrant hommage. « Le décès de M. WAKEU FOGAING prive le monde de l’art et de la culture du CMR d’une de ses figures importantes, un talent pur. Le défunt laisse une œuvre riche qui témoigne de son enracinement dans nos traditions. Je salue sa mémoire et adresse mes condoléances à sa famille », écrit-sur twitter le mercredi 24 mars 2021.
Ci-dessous, son portrait rédigé par Monica Nkodo de Cameroon-Tribune.
Le promoteur de l’Espace Tengang et de la Compagnie Feugham à Bafoussam, dans la région de l’Ouest, s’en va après plus de 30 ans de dévotion au théâtre. Cet art, compagnon de toute une existence, il le découvre pour la première fois au CEII, quand son institutrice emmène sa classe vivre « La malédiction héréditaire » de Raymond Ekossono, jouée au Lycée Général Leclerc.
Au Collège Saint Thomas D’Aquin de Bafoussam où il poursuit ses études secondaires, il rentre un peu plus en profondeur dans l’univers de la dramaturgie. Le club théâtre lui tend les bras, et il s’y agrippe bien fort. Si fort que cette passion brûlante le pousse à se perfectionner. En 1984, Wakeu Fogaing emprunte officiellement le couloir du théâtre, et en 1989 il écrit sa première pièce « Kamwa ou l’œil du village ». Pour aller encore plus loin, le jeune Fogaing se rapproche des références du domaine. Dave K Moktoï, Kouokam Narcisse, Essindi Mindja, Jean Miché Kankan, des humoristes à texte, lui servent de mentors. D’eux, il apprend à tirer des faits d’actualité ce filet comique, glissant, ravageur. Au Labado Théâtre en 1992, il est forgé sous le marteau professionnel de François Bingono Bingono qu’il appelait affectueusement « maître ».
Wakeu Fogaing veut se démarquer des figures du théâtre et développer son propre style. Il crée alors en 1999 Monsieur Nimportequi, ce personnage pluriel capable de passer du chef de famille au détourneur de fonds publics, puis au saoulard avant de redevenir l’honnête commerçant. Son œuvre prend des couleurs engagées quand il défendait la cause des femmes, mais surtout patrimoniales quand il questionnait les traditions. Ses spectacles parlent de colonisation, de corruption, en même temps qu’ils abordent les rites et coutumes traditionnelles de son Ouest natal avec une plume autant drôle que critique. Sa puissance sur scène et sa capacité à dominer les personnages qu’il incarne érigent sa réputation dans le monde du théâtre. Il est le seul Camerounais à avoir participé quatre fois au Festival d’Avignon en France, événement international considéré comme le Mondial du théâtre, sous la direction de metteurs en scène prestigieux comme le Français Frédéric Fisbach ou le Congolais Dieudonné Niangouna.
Sa carrière bien remplie au service du théâtre compte des dizaines de pièces, mais aussi du cinéma, car avec la Compagnie Feugham, Wakeu Fogaing réalise des films. En 2016 par exemple, sort « Le revers de la haine », son premier long-métrage adapté de son spectacle et du livre éponyme publié aux Editions Teham. « Je retiens de lui un attachement au savoir traditionnel qui inspire et continuera de susciter des vocations », a déclaré à son sujet Teham Wakam, patron de la maison d’édition. Monsieur Nimportequi ne part pas sans avoir transmis son savoir. Enseignant de dramaturgie à l’Institut des Beaux-Arts de Foumban, il a également inspiré la jeune génération constituée de Valery Ndongo, Major Asse, Basseek Fils Miséricorde ou Nana Ardo, venus en pèlerinage artistique à Bafoussam s’abreuver à son école. Aujourd’hui, tous saluent la mémoire de celui qui jouait chaque spectacle comme si c’était le dernier.