Aujourd’hui au Cameroun, les jeunes sont plus que jamais unis. Mais unis autour de quoi certains se poseront surement la question. Autour de leur avenir ? Des salles de classe ? Des bibliothèques ? Eh bien, rien de tout cela !
La jeunesse camerounaise est plus que jamais unie aujourd’hui autour des kiosques de PMUC (Pari Mutuel Urbain Camerounais) et de Premier pari foot qu’elle considère comme étant des kiosques à bonheur !
« Atlético m’a ndem ! », « c’est city qui m’a mouf sur mon ticket d’hier ! », « St Etienne a fait fort hier ! », « gars j’ai lost 85000 a cause de United ! » « Gars les 3 cotes de 4 là sont djoum ! Tu vois la malchance ! » Voila exactement le genre de discours qui est donné partout ou vous verrez des jeunes rassemblés dans la plupart des grandes villes au Cameroun, et par ceux là même qui sont appelés « le fer de lance de la nation. »
Il y a quelques années, le Pari Mutuel Urbain Camerounais (PMUC) était l’organisation de jeu de probabilité jouissant d’une visibilité absolue du fait de la forte présence de ses kiosques sur les trottoirs urbains et ruraux de notre pays. Mais cette prédiction monnayée sur les résultats des courses était alors considérée comme un jeu d’adultes et de personnes âgées. Aujourd’hui il est devenu l’opium de la jeunesse. Le football étant un appât pour les jeunes, aujourd’hui, au PMUC désormais on pari sur le foot ! C’est le phénomène Pari foot ! Le nouveau gouffre à sous de beaucoup de jeunes, l’objet parfois de leur seule attention, au détriment d’autres priorités. Beaucoup de jeunes n’ont la tête désormais qu’à parier sur les matches.
Le principe et les règles de jeux sont contenus dans une charte vendue à 25 FCFA et il est requis de se procurer une nouvelle fiche chaque fois que les matches de championnat ont lieu. Tout est dans la somme d’argent que l’on sacrifie et la côte des équipes sur lesquelles on parie. Car les parieurs peuvent miser sur autant d’équipes que leurs moyens les leur permettent. Le seul risque qui réside est celui de perdre tout son argent lorsque ne serait ce qu’un seul résultat des matches pariés s’avère erroné. Le coût minimal pour un pronostique de PARI-FOOT est de trois cents francs CFA. Chaque match correspond à un numéro, similairement au jeu de course des chevaux.
Simplice, étudiant a l’université de Dschang, et qui se considère comme un joueur professionnel du pari- foot, nous livre ici certaines révélations : « le pari- foot est un jeu des connaisseurs, c’est pour les intellectuels. (Rires) les gens doivent savoir que c’est un vol organisé parce que le rang des équipes en championnat que le pari foot inscrit sur la fiche est très loin de la réalité. Ils disent par exemple qu’une équipe est 2e au championnat alors qu’elle est 16e surtout lorsque c’est un championnat peu connu par les parieurs.les gens ne doivent pas se fiés a la fiche qu’ils achètent au kiosque. Le pari- foot est devenu une drogue pour moi ! Chaque fois que je perds, je me dis toujours que demain, je vais gagner. »
Jeunes et moins jeunes sont devenus militants de ce nouveau parti politique, qui plonge la jeunesse dans une hibernation inquiétante et une seule chose trotte dans l’esprit de cette dernière : devenir millionnaire a tout prix ! Les conséquences de cette déviation n’ont pas tardé à être visible. Dans une ville estudiantine comme Dschang, il n’est pas rare de voir des jeunes marcher tout en parlant à eux mêmes. Certains étudiants, même en plein cours sont connectes au site livescore.com ou ils passent leur temps à vérifier si l’équipe sur laquelle ils ont parié est victorieuse. Ceux d’entre ces jeunes qui ont la chance d’avoir un poste téléviseur à domicile reste figé toute la nuit devant le petit écran au détriment des cours reçus en journée dans les amphis. Ces jeunes parieurs ont peut être oublié que quelquefois, le poisson peut devenir du poison !
© Correspondance de Franck KEMAYOU NJEKOUA