Les camerounais en savent un peu plus sur le déroulé et les auteurs des événements tragiques survenus dans la nuit du 13 au 14 février 2020 dans le village Ngarbuh, dans le département du Donga-Mantung, région du Nord-Ouest, à travers le communiqué du ministre d’Etat secrétaire général de la présidence de la République, qui dévoile les conclusions de l’enquête instruite par le président Paul Biya, rendu public le mardi 21 avril 2020.
Ayant pris connaissance du rapport de la commission d’enquête, le président de la République a prescrit entre autres mesures, l’ouverture d’une procédure disciplinaire contre le chef de bataillon Nyiangono Ze Charles Eric, commandant du 52eme bataillon d’infanterie motorisé (BIM) qui a autorisé la mission, et tous les militaires ayant participé à l’opération de Ngarbuh ; l’arrestation du sergent Baba Guida qui a conduit l’opération, celle du gendarme Sanding Sanding Cyrille et du soldat de première classe Haranga Gilbert et les dix membres du comité de vigilance qui ont participé à ces événements qui ont abouti à la morts de 5 terroristes, 3 femmes et 10 enfants et à la saisie de plusieurs armes. Militaires et membres du comité de vigilance sont accusés d’avoir « participé à une opération ayant causé la mort de plusieurs personnes et des incendies de maisons ». Le sergent Baba Guida, en plus de cela, est à l’origine du compte rendu biaisé de l’opération à sa hiérarchie ; compte rendu sur la base duquel le gouvernement avait jusque-là, fondé sa communication.
Il ne s’agit pas d’un massacre, mais plutôt d’une bavure de l’armée. Les corps des victimes sont à exhumer pour des obsèques dignes et les familles qui ont perdues leurs membres au cours de ce drame seront indemnisées, le tout aux frais de l’Etat.
Siméon Roland Ekodo Mveng, socio-politiste et écocitoyen du village planétaire dans une publication sur son mur Facebook le 21 avril fait une analyse de la publication de la synthèse du rapport d’enquête de Ngarbuh. De prime à bord, le spécialiste de sciences politiques salut la publication de ce rapport, mais s’interroge sur certains rapports manqués et les sanctions des prévaricateurs de la CAN manquée de 2019, ainsi que les autorités préfectorales qui violent les libertés et le droit de manifestation publique. L’universitaire s’interroge également sur l’opportunité de la publication d’un tel rapport au regard des enjeux socio-politiques et médiatiques du Cameroun en ce moment, marqué aussi par l’observation permanente de la communauté internationale.
« La conclusion inédite d’une enquête au Cameroun est tout de même à saluer, parce qu’elle rompt avec le nihilisme traditionnel de ces zélotes du régime qui s’illustrent souvent par l’auto-disculpation, le mensonge d’État et les colorations toutes en rose du système. Elle se démarque ostensiblement du silence administratif coutumier sur les fautes des agents publics et sur la violation permanente de l’État de droit et de la justice. Elle contraste nettement avec l’histoire des lourdeurs administratives, des procédures chronophages et manœuvres inhibitrices des dossiers chauds. Mais à quand le retour à la paix donc? À quand le rapport d’Ésséka? À quand la sanction des prévaricateurs de la CAN avortée de 2019? À quand la sanction des préfets qui violent les libertés et le droit de manifestation publique? À quand la criminalisation des auteurs des fraudes électorales? Autrement le chercheur s’interrogerait encore en ces termes: le mea-culpa de Ngarbuh Est-il un théâtre politique organisé par le gouvernement pour se refaire une virginité médiatique ? Est-ce un rite sacrificiel de sous-gradés pour contenter la communauté internationale et distraire l’opinion? Est-ce un cadeau éolien pour consoler les familles de victimes puisqu’il n’y aura pas de résurrection de tous les morts tombés au NOSO depuis 2016. Si jamais le gouvernement est moralement sérieux dans sa démarche de repentance est-ce que les séparatistes sont prêts à confesser également leurs exactions et à déposer les armes ? Sinon À qui profite la continuation de cette crise? Les partis en conflit mesurent-ils le préjudice causé à la nation ou les risques de poursuite de cette guerre dans un contexte de pandémie planétaire ? », écrit Siméon Roland Ekodo Mveng