Retour avec Lebledparle.com sur les 05 décisions de Atanga Nji, le « Moulinex », les plus surprenantes qui ont divisé au sein de l’oponion publique camerounaise.
2018 : Paul Atanga Nji interdit la vente d’armes et de munitions dans six régions au Cameroun
En avril 2018, le Cameroun a interdit la vente d’armes et de munitions dans six régions du pays, dont les deux régions anglophones en profonde crise socio-politique depuis alors plus d’un an. Le ministre de l’Administration territoriale, Paul Atanga Nji, a décrété « l’interdiction, jusqu’à nouvel ordre, de la vente des armes de chasse et de protection ainsi que leurs munitions dans les régions de l’Adamaoua, du centre, du Littoral, de l’Ouest, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest », selon un communiqué.
Il faut dire que cette mesure d’Atanga Nji a été motivée par la nécessité de renforcer la sécurité publique dans un contexte où les tensions socio-politiques et les actes de violence étaient en augmentation. Pour le gouvernement, il fallait restreindre l’accès aux armes et à réduire les risques associés à leur possession inappropriée. Toufois, si en théorie, cette décision visait à protéger les citoyens et à prévenir une escalade de la violence dans ces zones, il faut reconnaitre que l’application de la prohibition s’est avérée peu évidente. En effet, malgré l’annonce officielle de l’interdiction, les importations d’armes se sont poursuivies, montrant ainsi une augmentation inquiétante du trafic d’armes sur le territoire national. De cette période à date, le volume des importations d’armes, de munitions et d’équipements accessoires en 2023 a au contraire progressé de +42%, selon les chiffres disponibles.
Aout 2020 : Le Ministère de l’Administration territoriale bannit la vente des machettes dans la zone anglophone
Dans une correspondance aux gouverneurs du Nord-Ouest et du Sud-Ouest le 18 août 2020, Atanga Nji instruit la mise en œuvre d’une réglementation spéciale relative à la vente des machettes, haches et le fer. « Mon attention a été attirée depuis un certain temps sur le fait que les terroristes décapitent des honnêtes citoyens avec des machettes et utilisent le fer de construction de diamètre 6, 8 et 10 pour la fabrication des engins explosifs et comme munitions pour les armes artisanales. Ces actes barbares m’amènent à vous instruire, des mesures conservatoires visant à restreindre l’achat, l’utilisation et la possession des armes blanches dans vos régions respectives », écrit le Minat dans son adresse aux patrons des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Dans un contexte de crise anglophone, cette décision de Paul Atanga Nji pouvait être dite salutaire dans la mesure où elle visait à encadrer la commercialisation et l’utilisation de ces instruments potentiellement dangereux. Tout achat devait alors être accompagné d’une justification claire, liée à des besoins agricoles ou de construction. Les vendeurs devaient également se conformer à des normes strictes, incluant une vérification de l’identité de l’acheteur et le motif précis de l’achat. Malgré ces bonnes intentions, la mise en œuvre de cette réglementation s’est avérée difficile, voire impossible sur le terrain. Et la mesure semble aujourd’hui être morte de sa propre mort. A ce jour l’achat de coupe-coupe se fait sans la moindre restriction dans ces régions.
Mars 2022 : Le Minat interdit la vente et l’usage de la chicha et de ses produits
Le Ministre de l’Administration Territoriale Paul Atanga Nji, fait savoir cette autre interdiction dans un courrier qu’il a adressé aux gouverneurs de régions le 07 mars 2022.
Le texte interdisait alors formellement, l’importation, la vente, la promotion et la consommation de la pipe à eau sous le nom de « chicha ». Face à la montée de la délinquance juvénile et du grand banditisme en milieux urbains, liée à la consommation des drogues et autres substances psychotropes, le Minat ne voulait certainement que protéger la santé de la population et préserver le bon ordre public.
Alors que l’application de cette décision n’a pas été palpable sur le terrain, le même ministre, à fin septembre 2024, a menacé son collègue de la Santé dans une lettre ouverte, lui demandant de cesser la lutte contre la consommation dans les débits de boisson.
Mai 2024 : Atanga Nji veut censurer l’expression « Mes chers compatriotes »
Dans un communiqué en date du 23 mai, le ministre de l’Administration Territoriale met garde toute personne qui prononcera encore cette formule dans un discours. Selon lui, « tout le monde le sait, seul le Chef de l’État incarne les institutions républicaines. Les acteurs politiques qui prétendent respecter les institutions doivent commencer par respecter celui qui les incarne, En effet, un député aux abois, exclu récemment d’un parti politique, tient régulièrement des propos désobligeants à l’endroit du Président de la République ».
Les acteurs politiques qui prétendent respecter les institutions doivent commencer par respecter celui qui les incarne, En effet, un député aux abois, exclu récemment d’un parti politique, tient régulièrement des propos désobligeants à l’endroit du Président de la République ». Cette autre interdiction de Paul Atanga s’est soldée par un échec. Puisqu’au lendemain de son interdiction, plusieurs présidents des partis d’opposition s’étaient inscrits en faux contre cette démarche.
Octobre 2024 : Interdiction des débats sur la santé de Paul Biya
Alors que l’état du président, âgé de 91 ans, fait l’objet de rumeurs alarmantes sur les réseaux sociaux, Paul Atanga Nji dans une lettre adressée le 9 octobre 2024 aux gouverneurs de régions, interdit « formellement » aux médias privés d’évoquer cette actualité. Désormais, “tout débat dans les médias sur l’état de santé du président est donc strictement interdit. Les contrevenants s’exposeront à la pleine force de la loi”, a déclaré Atanga Nji. Reste à voir comment cette autre mesure sera exécutée sur le terrain.
Toutefois, en plus d’entacher la relation entre l’État et les médias, cette interdiction met en lumière les défis auxquels font face les journalistes et le paysage médiatique au Cameroun. En soustrayant de manière arbitraire des sujets de discussion publics, le gouvernement cherche à contrôler non seulement la narration médiatique, mais aussi à verrouiller les conversations sociopolitiques essentielles à la bonne gouvernance et à la transparence. Les implications de cette mesure peuvent avoir des répercussions durables sur le climat public et sur la confiance que la population accorde à ses dirigeants.
Les décisions controversées de Paul Atanga Nji, ministre de l’Administration territoriale depuis 2018, ont contribué à un climat de tension et d’incertitude au Cameroun. Ses nombreuses interdictions, perçues comme liberticides par une large frange de la population, ont alimenté les débats et les divisions au sein de la société camerounaise.