Dans une tribune, le consultant médias déplore le climat socio-politique qui fait en ce moment au Cameroun. Il fustige l’attitude de certains camerounais adeptes de l’autophobie qui peut conduire le pays vers le chaos.
Lebledparle.com vous propose l’intégralité de la tribune.
Cameroun : Ceux qui ont la haine d’eux-mêmes conduisent le pays vers le chaos
Quand des adeptes de l’autophobie sont aux manettes, c’est la désolation assurée.
« Il n’est pire haine que la haine de soi, car elle vous interdit d’aimer les autres. » Cette célèbre citation de Jean-Michel Goldberg semble avoir été inspirée par l’environnement camerounais, tellement on a l’impression que l’amour de l’autre y a foutu le camp. En effet, la vie nationale est rythmée aujourd’hui de part et d’autre par les multiples expressions de la haine de l’autre : mépris, cynisme, égoïsmes, menaces, invectives, délations, calomnies, tribalisme, violences, crimes, etc. La prévarication à outrance, l’insécurité alarmante, la répression permanente, les guerres ne sont que les conséquences de cette haine de l’autre qu’engendre la haine de soi-même : on croit qu’on va s’aimer quand on sera plus riche et/ou plus puissant ou lorsqu’on éliminera l’autre pour que son regard qui semble nous percer à jour ne nous hante plus.
Malheureusement, quand on n’obtient rien par le mérite, lorsqu’on est obligé de voler ou de se faire acheter, ou d’être chosifié pour exister, si on ne peut s’offrir l’illusion d’avoir réussi socialement qu’en s’adonnant à des pratiques déshumanisantes et sataniques, on a forcément du mépris de soi. On retourne donc ce mépris de soi contre ceux qu’on envie parce qu’ils préservent leur liberté et leur dignité. De même, quand on est complexé par ses origines ou par sa condition humaine et sociale, on a tendance, espérant ainsi leur transférer la honte qu’on a de soi, à insulter, dénigrer ou humilier ceux que vous jalousez parce qu’ils s’acceptent tels qu’ils sont, et se montrent fiers de leur condition.
Un Etat dont la gouvernance s’appuie sur les passe-droits, les abus de pouvoir, la corruption généralisée, la tricherie, le mensonge permanent, l’exacerbation de clichés ethniques réducteurs, et l’abêtissement des populations pour exister, masquer ses tares et se perpétuer, un tel Etat produit fatalement beaucoup d’individus qui ont la haine d’eux-mêmes. L’intolérance, la méchanceté, la cruauté, la haine, etc. qui sont dangereusement en hausse au Cameroun sont donc simplement logiques. On a l’impression que les camerounais ont décidé d’engager la marche funèbre vers le chaos, en chantant en chœur et en boucle les hymnes « Ça gâte, ça gâte » et « On s’en fou, advienne que pourra ».
Empêcher la chute dans le précipice de la guerre civile totale vers lequel le Cameroun avance sûrement doit être le seul combat du moment des camerounais qui conservent encore un brin de lucidité dans la perception de la situation de leur pays. Il faut espérer qu’ils sont nombreux et ne baisseront pas les bras pour se contenter de fredonner le titre à succès « on va faire comment ?». Il faut s’impliquer, chacun avec ses capacités et ses moyens.
En vérité, il y a urgence que chaque camerounais réapprenne à s’aimer lui-même, afin qu’il puisse reporter cet amour sur ses compatriotes. Mais ceux qui ont stimulé et entretenu la haine de soi et des autres, sont disqualifiés pour piloter le réarmement psychique salvateur.
Charles MONGUE-MOUYEME