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« Coller la petite » de Franko, haro sur l’enjaillement !

Coller la petite Glez

L’interdiction de la chanson « Coller la petite » dans un département camerounais suscite l’indignation des pourfendeurs de la censure. Elle alimente aussi un buzz qui garantit le succès au titre de Franko.

Coller la petite Glez
L’œil de Glez. © Glez / J.A.

Franco, le pape de la rumba congolaise décédé à Bruxelles en 1989, se retourne-t-il dans sa tombe, quand il entend qu’une polémique accompagne un titre de… Franko ? Une chose est sûre : son homonyme camerounais – qui écrit son pseudo avec un « k » – est d’une autre génération. Les mélopées sirupeuses à la voix de rossignol ont cédé la place à des titres bien plus triviaux, tant sur le plan des paroles que des chorégraphies.

Les paroles ? Traditionnellement, on s’en moque un peu, dans la musique d’ « ambiance facile », tant que Salif Keïta n’agace pas en fredonnant « Africa Ôh, c’est ça son fort : manger beaucoup ». Bien sûr, dans son single « Coller la petite », Franko présente le dancefloor comme une superette à « gos » : « Il y a beaucoup de petites, fais ton choix (…) y a tout genre de lolos, les babouches et les pointus ». Après avoir vanté les têtes de gondoles, le machiste de supermarché invite à une consommation quasiment « anthropophage » : « choisis ta petite, mange-la avec appétit ». De produit, la « petite » devient même proie, à l’occasion du refrain : « Récupère la petite, angoisse la petite, embrouille la petite et maintenant colle la petite ». Et le chanteur de servir une assertion énigmatique aux oreilles des non-initiés : « chez nous le lait ne se donne pas ».

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Faut pas fâcher hein, nous s’amuser…

Bien sûr, la pochette du titre, tout en smileys, semble dire « Faut pas fâcher hein, nous s’amuser ». Pourtant, certains ne semblent pas priser la vocation purement « enjailleuse » de la chanson, ni le body shaking qui, dans le clip, prend des airs de Kama Sutra. Le 2 novembre dernier, dans le cadre de la lutte contre la dépravation des mœurs, le préfet du département de la Mifi, Joseph Tover Twanga signait un arrêté « portant interdiction de la vente, la diffusion et la promotion de l’œuvre de l’artiste Franko », précisant que tout contrevenant aux dispositions du présent arrêté s’exposait « aux sanctions prévues par la réglementation en vigueur ». Dans la foulée, les garants de la morale se signalaient dans d’autres pays comme le Togo où des internautes invitaient leurs autorités à emboîter le pas du préfet de la Mifi, afin de faire taire ce « message pervers véhiculé auprès de la jeunesse ».

Au Cameroun, aux critiques scandalisées par une invitation à d’intempestifs frottements répondent des réactions offusquées par la censure : réactions d’hommes de médias comme l’animateur de Ell’fm, Théodore Ted Ndanga, qui accuse le préfet rabat-joie de préférer le « Bobaraba » venu de Côte d’Ivoire ; réactions d’artistes comme la star du bikutsi Lady Ponce qui qualifie de « vieux » ceux qui dirigent le Cameroun ; réaction de la société civile comme la Ligue camerounaise des consommateurs (LCC) qui demande la levée de l’arrêté inopportun.

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Sur les sites dédiés à la musique africaine, beaucoup considèrent que « Coller la petite » sera le titre africain de l’année…

Comme de bien entendu, cette interdiction partielle est une publicité gratuite qui contribue au succès de « Coller la petite ». Au moment où la polémique enflait, Franko était classé numéro un du Urban Hit de la chaîne de télévision Trace Urban. Sur YouTube, la vidéo officielle enregistre près de quatre millions de vues, contre un million avant le buzz suscité par l’interdiction. Solidarité avec un titre martyrisé par la censure ou jugement critique indépendant de la polémique ? Sur les sites dédiés à la musique africaine, beaucoup considèrent que « Coller la petite » sera le titre africain de l’année…

De toute façon, la chanson de Franko le dit : « Même la police ne va pas nous arrêter »…

© Damien Glez, dessinateur-éditorialiste franco-burkinabè

 


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