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De la prison…: Nguini Effa dit tout sur la gestion du pétrole

    

Dans son dernier ouvrage « Les hydrocarbures dans le monde en Afrique et au Cameroun », l’ex-directeur général de la société camerounaise des dépôts pétroliers (Scdp) revient sur la commercialisation, l’évolution des prix, le raffinage et le fonctionnement du marché des hydrocarbures.

De l’aveu de l’éditeur de l’ouvrage lui-même, c’est à travers « l’étude des échecs d’un petit pays producteur, le Cameroun, que l’auteur donne un point de vue englobant sur la géopolitique et la géostratégie impliquées dans les secteurs du pétrole et du gaz naturel ». C’est à travers ce prisme que le pensionnaire de la prison centrale de Kondengui, Nguini Effa, a d’abord été écroué à New-Bell à Douala- propose sa longue réflexion pour une gestion optimale de ressources pétrolières dans un monde en pleine crise énergétique. Dans sa deuxième production éditoriale depuis qu’il a été emprisonné en 2009, l’auteur suggère que les Etats africains dont le Cameroun, songent urgemment à l’intégration continentale « au moyen des hydrocarbures ».

Dans cette veine, il regrette par des mots à peine voilés l’assassinat, le 20 octobre 2011, à Syrte du guide libyen, Mouammar Kadhafi qui, selon lui, est « le dernier panafricaniste » de notre époque. Le seul qui avait bâti une vraie intégration sur les ressorts des ressources naturelles en Afrique. Il en veut pour preuve, que le leader libyen a voulu à plusieurs reprises créer un gouvernement continental. Mais il rencontrera à chaque fois l’opposition de nombreux chefs d’Etats. « Les pairs de Kadhafi vont rester englués dans leurs égoïsmes et le manque de solidarité », écrit-il. Or, le secteur des hydrocarbures nécessite des capitaux très importants et une infrastructure d’exportation et d’importation « excessivement lourde » qui s’accommode mal de « petites révoltes » localisées, tribales ou ethniques. Pourtant suggère-t-il, ces petits Etats forts, parfois avec des pouvoirs politiques minoritaires et la complicité des compagnies pétrolières développent des systèmes autoritaires qui sont parfois « à la base de leur… instabilité ».

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Il illustre cette argumentation par le cas du Congo Brazzaville, le Soudan ou encore l’Angola. Jean Baptiste Nguini Effa propose également de renforcer les capacités de raffinage du brut localement. Cela est même fortement envisagé, reconnaît-il, un peu partout en Afrique et même au Cameroun. Seulement, « en dehors de toute volonté d’intégration sous-régionale et même en dehors d’une réelle volonté panafricaine », ces projets auront du mal à démarrer.

S’attardant sur le Cameroun l’auteur affirme que malgré le fait que l’Etat a approuvé le projet d’extension et de modernisation de la Sonara qui devrait passer d’une capacité de 42. 000 à 65. 000 baril/jr, le projet qui a déjà démarré a connu le désaccord total de son assistant technique originel, le français Total. Preuve peut-être qu’une logique d’intégration à sa base aurait boosté le projet.

1000 milliards Fcfa de subvention

Et Jean Baptiste de la Salle Deo Gratias Nguini Effa d’entrer de plein fouet dans la gestion interne du pétrole au Cameroun. Il y pénètre par une question aux airs peu guindés : « Peut-on dire que les hydrocarbures sont bien gérés au Cameroun ? » se demande – t-il. Et la réponse est plus élaborée: « Oui et non », affirme-t-il. Oui, parce que la stratégie et la structure sont bien affinées. Non, parce que du point de vue économique et social, le Cameroun n’a presque pas su profiter des rentes pétrolières « pour tenter de s’extirper du sous-développement chronique vers l’émergence ». Selon lui, le pays pèche pour n’avoir pas pu ou su bâtir une raffinerie de seconde génération. Il épingle par ailleurs la gestion de la structure des prix. Et notamment la rétrocession de 1.000 milliards FCfa depuis 2008 aux consommateurs via la Csph pour subventionner « en pure perte » les produits pétroliers sans être sûr que « lesdites subventions profitent aux couches les plus défavorisées ». Or, 1000 milliards Fcfa auraient pu désenclaver toutes les routes rurales et moderniser l’agriculture, moderniser les Universités et les hôpitaux. Et pourquoi ne pas effacer 60% de l’encours de la dette publique. Jean Baptiste Nguini Effa regrette avec Babissakana qu’il y ait 10 milliards de dollars « dont il est difficile de retrouver l’utilisation » dans les flux globaux de la rente pétrolière au Cameroun. 9 milliards seulement sont traçables. De ce fait suggère-t-il, un audit sérieux sur les comptes publics depuis les indépendances.

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Dans son ouvrage « Les hydrocarbures dans le monde en Afrique et au Cameroun », 457 pages, paru aux éditions l’Harmattan, l’ex patron de la Scdp revisite également -sur un découpage en 6 parties- les origines préhistoriques des hydrocarbures, leurs premières utilisations, l’essor des grandes compagnies, les caractéristiques du brut, l’historique du raffinage, les procédés pétrochimiques, les questions géopolitiques et géostratégiques du pétrole et du gaz dans le monde. L’éditeur de ce volumineux essai classé dans sa rubrique « défense stratégie et Relations internationales » et fortement illustrés par de graphiques, cartes, photos, schémas le recommande aux étudiants de pétrochimie, des sciences physiques ainsi qu’aux professionnels du secteur. En sus, l’auteur entend mettre à la disposition du public, « La Bible des hydrocarbures ». Avis aux amateurs.

(c) Rodrigue TONGUE


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