Dans les colonnes du journal Le Jour, édition du jeudi 18 juillet 2024, Haman Mana, a adressé une lettre ouverte au Préfet du Mfoundi pour exprimer son indignation à l’égard d’un récent arrêté interdisant toute critique envers le Président de la République, Paul Biya. En sa qualité de directeur de la publication du quotidien bleu de la Rue CEPER à Yaoundé et enseignant universitaire aux États-Unis, Haman Mana a vivement réagi contre les mesures prises par le Préfet Emmanuel Mariel Djikdent pour expulser de Yaoundé les opposants au Président Biya.
Dans sa lettre, Haman Mana remet en question l’autorité du Préfet en demandant : « De quoi êtes-vous le ‘préfet’ ? » Il critique ouvertement la politique répressive du régime en place et condamne l’arrêté du 16 juillet 2024 qui qualifie les critiques envers le Président Biya d’actes anti-patriotiques justifiant l’expulsion des dissidents de la ville.
Haman Mana souligne la détresse du peuple camerounais et estime que tout citoyen a le droit légitime d’exprimer ses frustrations sans craindre des représailles. Il dénonce également la situation sanitaire et sociale précaire dans la capitale qu’il compare à une « fosse septique à ciel ouvert » engendrée par un manque d’action des autorités.
Enfin, Haman Mana appelle à plus de compassion et de compréhension envers les souffrances du peuple camerounais et critique le climat de répression politique instauré par le gouvernement actuel.
Lebledparle.com vous propose en intégralité, la missive de Haman Mana :
« Monsieur le préfet,
J’ai lu, sidéré, le tout dernier arrêté sorti de votre auguste cabinet.
De ce galimatias où se côtoient entre autres fautes de grammaire, d’orthographe et d’usage, on peut extraire l’idée suivante: vous vous réservez le droit d’interdire le séjour dans la capitale du Cameroun, à toute personne qui critique le président de la République, monsieur Paul Biya.
Cher Monsieur,
A quoi vous occupiez-vous en décembre 1990 et Janvier 1991? (J’imagine, vous couriez après le tonton qui, de son influence politique ou de sa puissance lucrative allait assurer votre entrée à l’Enam). Eh bien, en ce temps-là, un jeune banquier, Célestin Monga interpella votre » vache sacrée » dans une lettre ouverte publiée par Le Messager de Pius Njawé. Morceau choisi : [s’adressant au président de la République] » Outrageusement condescendant, paternaliste et prétentieux » …
Il s’en est suivi un procès pendant lequel, les forces de la société civile et les populations du Cameroun se sont mobilisées dans une confrontation avec le pouvoir qui a duré près de deux ans. C’est ce que l’on a appelé » les années de braise ». D’où le peuple camerounais est sorti avec la relative liberté d’expression (en fait, de » bavardage ») contre laquelle s’érigent vos quelques lignes sur papier format A4.
Monsieur le préfet,
D’un coup de crayon vous ne pouvez pas effacer tant d’années de péripéties et de luttes des populations camerounaises.
Cher Monsieur,
D’ailleurs de quoi êtes-vous le « préfet »?
Vous êtes le préfet d’une immense fosse septique à ciel ouvert une capitale envahie par les déchets, les déjections humaines et animales. S’il y a quelque chose à éjecter du département du Mfoundi, c’est sans doute toute cette saleté qui apporte la maladie, le mal vivre et le mal être. Pas de pauvres Camerounais qui ont le droit de crier leur mal être, leur mal vivre en interpellant LE RESPONSABLE de leur misère« .
Haman Mana
P.S : Monsieur Biya n’a plus besoin d’être « dangereusement outragé » par quoi que ce soit. Son interminable et insensé règne qui mène le Cameroun sur une voie dont personne ne connaît l’issue est, en matière d’outrage, le tarif maximal.