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Dialogue national : « Paul Biya a répondu à la pression de la communauté internationale » (Tribune)

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Wanah Immanuel Bumakor, membre du mouvement Agir fait une analyse du discours du Chef de l’Etat dans lequel, il a annoncé la tenue à la fin de ce mois d’un grand dialogue national. Le spécialiste des relations internationales souligne que le Président de la République a cédé à la pression internationale. Lebledparle.com vous propose l’intégralité de la tribune libre.


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Paul Biya discours du 10 septembre 2019 – capture vidéo

*UN DIALOGUE VISANT À SATISFAIRE LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE ET À NE PAS RÉSOUDRE LES PROBLÈMES DES CAMEROUNAIS*

Un discours, censé être historique, a simplement démontré que Paul Biya est égal à lui-même. Il a donné l’impression que seuls les citoyens, en particulier les anglophones, qui sont mécontents de leur situation sont ceux-là qui ont perdu la tête, parce qu’il n’y avait pas un problème de marginalisation au départ. Il a clairement refusé d’être humble pour reconnaître que ce sont les mauvaises politiques de son gouvernement qui nous ont mené aux problèmes confrontés par les Camerounais aujourd’hui. L’incapacité d’admettre que son gouvernement n’a pas été à la hauteur des attentes de la population était tellement flagrante et persistait toujours dans ses politiques infructueuses de régionalisme et de décentralisation. Selon Paul Biya, l’État fait de son mieux et seules les personnes mal intentionnées veulent saboter les efforts du gouvernement, mais en raison de son altruisme, il est important de dialoguer. Cependant, il est impossible de résoudre un problème si vous n’admettez pas d’abord qu’il en existe un.

Aujourd’hui, le Cameroun est confronté à une pléthore de problèmes dans presque tous les domaines (sécurité, politique, socio-économique, judiciaire, etc.), mais Paul Biya pense toujours que le gouvernement a fait un bon rendement et ce ne sont que les sécessionnistes qui se plaignent. Totalement faux.

De toute évidence, le dialogue qu’il a appelé ressemblera vraisemblablement à la conférence tripartite des années 90, qui était un simulacre complet. J’espère seulement qu’il me démontre le contraire. Il révèle également que la seule raison de son discours était de répondre à la pression de l’appel au dialogue préconisé par la communauté internationale. Malheureusement, la situation est différente de celle des années 90 car il y a une guerre en cours dans une partie du pays avec des personnes portant des armes, ce qui rend le dialogue plus compliqué.

Comme c’est le cas dans de nombreux conflits, on dit toujours qu’il est facile de commencer une guerre, mais mettre fin à la guerre est l’une des choses les plus compliquées dans la résolution des conflits. Pour que la violence cesse efficacement, les parties belligérantes impliquées dans le conflit doivent être au cœur des négociations pour déposer les armes. Malheureusement, le plus souvent, ces personnes, en particulier les rebelles, bénéficient énormément de la violence qui les empêche de dialoguer. Par conséquent, toute issue à mettre fin au conflit doit impliquer toutes les parties prenantes au conflit, qu’elles soient directes ou indirectes.

À cet égard, pour que cela se produise, il faut instaurer un climat de confiance afin que les deux parties appellent à un cessez-le-feu et à un dialogue sans crainte. Ce renforcement de la confiance ne peut se faire que par des actions concrètes du gouvernement afin que les personnes ayant des griefs puissent s’exprimer librement sans craindre d’être arrêtées. Par conséquent, le fait que les forces de sécurité répriment brutalement les manifestations pacifiques, y compris l’impartialité du système judiciaire, qui continue de juger des civils devant les tribunaux militaires, et le fait que Paul Biya n’ait pas voulu répondre à ces insuffisances rendra difficile l’établissement d’un climat de confiance. Il est important de souligner ici que si le problème des libertés civiles, la non libération des prisonniers politiques et l’impartialité du système judiciaire ne sont pas résolus, il sera extrêmement difficile pour le dialogue appelé par le président d’amener à une paix durable. La situation risque plutôt de s’aggraver comme nous l’avons témoigné ces trois dernières années.

 

Compte tenu des diverses crises auxquelles le pays est confronté aujourd’hui, peut-on affirmer avec certitude que Paul Biya entend réellement écouter les Camerounais et répondre efficacement aux besoins de la population ? Ou bien s’agit-il d’un autre stratagème de sa part pour faire plaisir à la communauté internationale afin de se soulager de la pression extérieure, à laquelle il n’a pas été habitué pendant ses 37 années de pouvoir ? Qu’en est-il de la pression interne ? Quand les Camerounais vont-ils enfin se rendre compte que le conflit traîne en longueur et que leur pays est en train de couler, parce qu’ils n’ont pas de gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple et qu’il est grand temps de prendre les choses en mains ? Quoi qu’il en soit, seules les actions parleront plus fort que les mots.

*Wanah Immanuel Bumakor*

Pour approfondir :   Protais Ayangma Amang : « [Paul Biya] a glissé sur les principales préoccupations des Camerounais » dans son discours de fin d’année 2018

Porte-parole du movement AGIR,

Spécialiste en études de paix et gestion de conflits.

Wanah Bumakoh


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