Selon l’économiste, les condamnations et les cris d’indignation suite à l’assassinat de 7 élèves samedi dernier dans une école privée de Kumba ne pourront jamais mettre un terme à la crise anglophone. Cette dernière estime Dieudonné Essomba, perdurera encore « 40 années » tant que l’Etat du Cameroun ne mettra pas sur pied le fédéralisme. Lebledparle.com vous propose ci-dessous sa chronique envoyée le 25 octobre à notre rédaction.
Crimes au NOSO : personne ne peut dire qu’il n’a pas été averti !
Des enfants massacrés ! De petits enfants, à l’intérieur d’une école !
Et face à cela, par quoi répond-on ? Des condamnations et des cris d’indignation !
Ces indignations et ces condamnations hyperboliques font quoi ? Elles ressuscitent les enfants ? Elles arrêtent les massacres ? Elles désarment les Amba Boys ?
Elles servent à quoi, au fond puisqu’elles correspondent exactement à ce que recherchent les responsables de ces abominables crimes !
Ces criminels ne recherchent pas l’approbation de quiconque, mais la terreur et l’indignation ! Ils savent bien qu’en tuant les écoliers, les Camerounais vont hurler leur horreur, mais ils n‘en ont cure, ou plus exactement, c’est même l’ampleur de la désapprobation qui les conforte dans l’efficacité de leur action et renforce leur détermination !
Moi, Nti ESSOMBA, je vous avais pourtant sévèrement mis en garde : vous ne pouvez pas mettre fin à la sécession anglophone par les moyens militaires. Les Anglophones représentent en effet 3 caractéristiques qui rendaient leur maintien forcé dans un Etat unitaire radicalement impossible :
1- Ils ont vécu dans un Etat fédéré qui a été supprimé, ce qui développe une inextinguible nostalgie de leur liberté confisquée ;
2- Ils représentent 20% de la population camerounaise, ce qui est excessif pour un contrôle unitaire ;
3- Ils se sont unis aux Francophones sous l‘égide des Nations-Unies, ce qui donne à leur problème une dimension internationale.
Face à cela, il n’existait qu’une seule solution : le retour à une Fédération renouvelée, par exemple à 10 Etats, comme l‘ont demandé les Fédéralistes anglophones. L’avantage de ce retour était triple :
1- Elle réduisait l’attractivité de la Sécession
2- Elle permettait d’opposer aux sécessionnistes une police locale qui maitrisait mieux le terrain, l’armée nationale venant en appui
3- Elle compliquait la lutte des Sécessionnistes qui ne pouvaient pas s’attaquer aux infrastructures appartenant à l’Etat local, au risque de s’aliéner la population.
Voilà ce que je vous avais dit dès le départ. Et je vous avais averti que le Cameroun unitaire n‘avait pas les moyens politiques, économiques, financiers, diplomatiques et stratégiques pour réduire militairement la Sécession anglophone.
J‘avais également annoncé que la Sécession Anglophone va épuiser l’Etat et entrainer l’effondrement du régime de Biya.
Mais face cette analyse anthropologique et économique faite par moi-même, Nti Essomba, des jeunes intellectuels sentant encore le lait de leur diplôme sont venus m’opposer des thèses farfelues et abracadabrantes sur l’Etat westphalien, monstre froid qui ne cède jamais, ainsi que d’autres concepts mystérieux qu’on lit dans les grimoires confectionnés par les Blancs.
Nous en sommes alors où ?
Les indignations et les condamnations, cela est bien beau, mais qu’est-ce que ça change ? Tout cela, c’est du vent qui n’a aucun impact ni sur la condition des enfants morts, ni sur la détermination des Amba Boys qui ne s’arrêteront pas!
Je l’ai dit et je vais le redire, la crise sécessionniste anglophone, c‘est une affaire de 40 ans !
A quatre ans, nous ne sommes qu’au début.
Nous ne sommes qu’au début des crimes et nous nous plaignons déjà ?
Nous n’avons encore rien vu !
Le pire est à venir.
Car, c’est cela le prix de l’Etat unitaire : un fleuve de sang.