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Forces dites « Progressistes » au Cameroun : Six raisons de l’impasse (Tribune)

Essi Franck Tribune

Franck Essi, SG du CPP a commis une tribune le vendredi 26 mars 2021 dans laquelle, il analyse les forces et les faiblesses des forces dites « progressistes » au Cameroun.


Essi Franck Tribune
Essi Franck – DR

Chaque jour, chaque semaine, chaque mois et chaque année voient s’agrandir dans notre pays, le nombre de citoyens/es qui rejettent le système de gouvernance actuel au Cameroun.

Face à cette situation qui devrait être favorable aux forces qui se posent en alternative au système dominant, on observe malheureusement que les conditions tardent à être réunies pour une dynamique pouvant aboutir à un changement systémique et profond.

D’où la question : Quelles ont été les erreurs, les fautes et les insuffisances commises hier comme aujourd’hui par les forces dites progressistes qui expliquerait en grande partie cette situation ?

Sans prétention à l’exhaustivité, il est important de noter un certain nombre de raisons qui ne sont pas toujours évidentes pour « le peuple du changement ».

1. Agir de manière éparse et sans coordination.

Il n’y a pas de meilleure manière d’échouer que de ne pas agir en synergie face à un même adversaire.

Le pouvoir se maintient grâce à la synergie qu’il crée et entretient avec une diversité de forces politiques, économiques, sociales, religieuses et traditionnelles.

C’est assez étonnant de ne pas observer en face le même effort pour construire et faire fonctionner une synergie entre forces progressistes ou forces d’opposition.

2. Ne pas créer des cadres d’évaluation collective de la situation et de diagnostic stratégique consensuel afin de pouvoir agir ensemble pour obtenir un certain nombre d’avancées historiques.

Le fait de ne pas se concerter de manière régulière diminue la connaissance que les leaders des différentes organisations ont les uns des autres.

Le fait de ne pas partager les analyses des situations n’augmente pas le potentiel de collaboration.

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L’absence d’habitude de concertations en période normale n’aide pas à gérer ensemble les périodes de crise.

 L’absence d’échanges réguliers, on l’aura compris, ne permet pas de bâtir les alliances solides entre forces progressistes nécessaires à la modification du rapport de force avec la majorité au pouvoir.

3. Ne pas utiliser de façon optimale tout le capital de frustrations causé par une gouvernance prédatrice et inefficace.

Par faiblesse, crainte ou insuffisance d’intérêt, les forces politiques ne se saisissent pas assez des différents scandales qui ponctuent la vie des populations au quotidien.

 Ce qui amène des pans importants de la population à estimer que ces organisations ne sont pas à leurs côtés pour défendre leurs intérêts.

Ce qui ne constitue pas des représentations qui facilitent des mobilisations futures.

4. Ne pas assez utiliser tout le capital d’enseignement que constituent les victoires remportées hier et ne pas systématiser les victoires partielles d’aujourd’hui.

Il y a de temps en temps, sur le plan social, civique ou politique, des victoires obtenues par des forces d’opposition. Il y a eu hier, des victoires obtenues par des forces progressistes.

Mais malheureusement, quand on observe les acteurs d’aujourd’hui se déployer, on a le sentiment que les victoires partielles d’hier et d’aujourd’hui ne sont pas systématiquement étudiées pour que des enseignements en soit tirés.

Ce qui amène à observer des régressions aussi bien au niveau organisationnel, tactique et stratégique dans leur déploiement actuel.

5. Ne pas s’inspirer suffisamment des victoires symboliques et historiques d’ailleurs.

Au – delà du Cameroun, d’autres forces progressistes ont obtenu des victoires sur les forces du statu quo. A titre d’exemple, on peut parler du printemps arabe, de l’alternance sénégalaise, de la révolution soudanaise.

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 On a l’impression que pour la grande majorité des forces progressistes camerounaises, « le Cameroun c’est le Cameroun ».

Ces exemples ne leur parlent pas et ne semblent pas secouer leurs routines.

Sans inférer que ce qui est vrai en Egypte, en Tunisie ou au Burkina Faso l’est automatiquement au Cameroun, il semble néanmoins qu’il y a de nombreuses leçons à tirer et de bonnes pratiques à reproduire dans le but de dynamiser les luttes au niveau du Cameroun.

6. Ne pas tirer suffisamment partie des nouvelles possibilités ou facteurs favorables tant au niveau interne qu’international telles que la préoccupation croissante pour la démocratie et le respect des droits de l’homme au niveau international, l’éveil et la prise de conscience chaque jour croissante dans notre pays, les nouvelles technologies de l’information et de la communication.

Nouveaux paramètres qui peuvent faire la différence dans la modification du rapport de force compte tenu des importants changements de donne qu’ils introduisent sur la scène politique.

Toutes ces raisons se couplent évidemment aux raisons internes à ces organisations sur lesquelles il n’est plus nécessaire de s’étendre telles que le déficit de ressources humaines, matérielles et financières, l’insuffisant ancrage social, territorial et institutionnel, une communication pas toujours appropriée et les diverses contradictions internes qui travaillent ces forces de l’opposition.

Ces erreurs, fautes et insuffisances doivent être impérativement corrigées. Sinon, l’après système actuel ressemblera à bien des égards au système actuel.

Franck Essi


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