«D’un côté, un adolescent accusé d’avoir participé à la fuite des épreuves du Bac 2020, arrêté et écroué ; de l’autre, un jeune sous-préfet en liberté, pourtant soupçonné d’avoir tué sa copine. Nous sommes au Cameroun», dixit Jean-Bruno Tagne.
L’ancien journaliste de Canal 2 international a dénoncé les tares de la justice camerounaise à l’aune du cas de l’élève Ngassam Noche Gervais Kevin, emprisonné dans le cadre des fraudes au baccalauréat dans une chronique qu’il a intitulée L’(in)Justice à deux vitesses. Lebledparle.com vous livre ci-dessous, l’intégralité de son texte publié le 5 septembre 2020.
L’(in)Justice à deux vitesses
D’un côté, un adolescent accusé d’avoir participé à la fuite des épreuves du Bac 2020, arrêté et écroué ; de l’autre, un jeune sous-préfet en liberté, pourtant soupçonné d’avoir tué sa copine. Nous sommes au Cameroun.
Il faut dire que la Justice camerounaise vit certainement l’un des pires moments de son histoire. Les magistrats sont devenus rois. Ils arrêtent sans discernement, condamnent à tour de bras, bref la machine est devenue folle.
La corruption y règne en maitre, les trafics d’influence sont décomplexés. Le justiciable ne sait plus à quel juge se vouer.
On avait pensé que le dernier Conseil supérieur de la magistrature permettrait de donner un sérieux coup de pied dans la fourmilière ou mieux de nettoyer les écuries d’Augias. Hélas ! la montagne a accouché d’une souris.
Au sortir de ce fameux Conseil, le ministre de la Justice, Laurent Esso déclarait au micro de la télévision publique, pince-sans-rire et avec un aplomb rare, que la Justice camerounaise se portait bien, qu’il n’y avait pas de quoi fouetter un juge.
Laurent Esso sait-il seulement qu’il y a dans nos prisons une foule de gens qui attendent d’être jugés depuis des lustres et parfois au-delà de la peine maximale encourue pour le crime dont ils sont soupçonnés ? Qu’attend M. Esso, garde des Sceaux depuis des temps immémoriaux pour faire appliquer les peines alternatives qui auraient pu dégraisser nos mouroirs de prisons ?
«Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir », écrivait La Fontaine. Cette fable est devenue la réalité de la justice camerounaise.
Monsieur le ministre, êtes-vous fier de votre justice ? Réussissez-vous à trouver le sommeil ?