Dans une tribune publiée sur Facebook le mercredi 03 février 2020, le Cinéaste Jean Pierre Bekolo répond durement à son compatriote Jean De Dieu Momo, après son soutien à l’équipe fanion de la RDC, le 30 janvier 2021, lors du match des ¼ de finale du Chan 2020 au stade de Japoma.
En arborant le maillot de la RDC, le réalisateur dans sa posture de panafricaniste apportait son soutien à ce pays de l’Afrique. Ce soutien n’a pas été vu d’un bon œil par le ministre délégué auprès du ministre de la justice qui n’a pas manqué l’occasion de le traiter d’antipatriote.
En guise de réponse. JP Bekolo demande à l’homme politique d’arrêter de propager la haine. « Non Monsieur Jean de Dieu Momo vous n’allez pas me faire perdre mon panafricanisme, vous n’allez pas m’entrainer dans la spirale de la haine et de la violence qui constitue votre ADN quelque soit le camp qui est le vôtre, vous n’allez pas me faire haïr les congolais, car c’est de la haine des autres que vous vous nourrissez. Arrêtez de disséminer la haine et la violence partout où vous passez, notre pays et l’Afrique en a assez de la violence et de la haine. Ce soir mon pays le Cameroun joue contre le Maroc, je souhaite à mes frères Marocains nous ayant fait l’honneur de venir dans notre pays célébrer la fraternité du football avec nous de gagner ce match (malheureusement je n’ai pas pu trouver votre maillot)! », écrit-il.
Ci-dessous, l’intégralité de la Tribune.
COMMENT EN SOMMES NOUS ARRIVÉS LA?
Au vu des réactions sur ma photo en supporter du Congo, je me suis demandé comment nous Camerounais en sommes arrivés là? Comment notre haine de nous-mêmes nous a amené à nous détester autant et à détester les autres? Notre guerre du NOSO, notre affrontement Biya-Kamto, nos luttes intestines où dans chaque village, dans chaque bureau les Camerounais sont en guerre les uns contre les autres nous affectent-ils au point où nous ne voyons plus dans le football un sport censé rapprocher les nations et les peuples? Comment en est-on arrivés à un point où pour un simple match de football, un ministre de la République parle de haute trahison, estimant que nous ne pouvons plus supporter une équipe africaine d’un pays frère venue célébrer la fête du football Africain? N’est-ce pas de l’incitation à la haine? Ca frise l’incident diplomatique quand on sait les risques de dérives causées par la passion du football. Comment en sommes-nous arrivés là, nous les camerounais? Pourquoi ne sommes-nous plus choqués par des velléités de tricheries vraies ou fausses pouvant mettre en cause la santé de frères africains invités chez nous? C’est encore juste pour gagner un match ou c’est devenu autre chose? Qu’est-ce qui nous arrive?
Ce qui nous arrive, c’est que nous sommes de plus en plus victimes d’une idéologie polarisée qui s’est développé ces dernières années sous prétexte de combattre, qui les français, qui Kamto, qui Biya, qui les anglophones, qui les francophones… une idéologie qui nous fait voir le monde sous un prisme binaire. Non! Le monde n’est pas fait que de méchants et de bons, non Monsieur le ministre tout le monde qui ne supporte pas l’équipe du Cameroun n’est pas un ennemi. Non! Le monde n’est pas que noir ou blanc, le monde est très souvent gris monsieur le ministre et cela tout votre problème.
Cette vision du monde, qui est en train de faire de nous les camerounais des monstres, le ministre Jean de Dieu Momo la développe déjà dans un film de la cinéaste Oswald Lewat AFFAIRE DE NEGRES. La cinéaste a tiré son titre des paroles de Momo. Il dit explicitement que le président Paul Biya a lancé le Commandement Opérationnel à Douala avec le colonel Mpay pour éliminer uniquement les Bamilékés. Je vous recommande vivement de regarder ce film. Une fois dans le gouvernement du même Paul Biya, il poursuit avec cette même idéologie de la haine mais à l’envers cette fois quand il s’est illustré en mondovision par un entretien où il promet aux Bamilekes le même sort que les Juifs à qui on avait tout donné et qui n’ont pas su être reconnaissants. S’il y a une constante dans cette idéologie de Jean de Dieu Momo qu’il soit contre Biya ou pour Biya, c’est la violence. Une violence qu’il voudrait m’imposer moi contre mes frères Congolais au détour d’un simple match de football… Des frères pour qui j’ai beaucoup de sympathie parce que je suis profondément panafricaniste, c’est à dire que l’Afrique passe avant le Cameroun n’en déplaise à certains. Le Congo me parle et m’a toujours parlé, peut-être parce que j’ai visité ce pays frères plusieurs fois et j’y ai tissé des amitiés fortes, il me parle surtout parce que c’est le pays de Lumumba. Je sais que Paul Biya n’a jamais cité Lumumba dans aucun de ses discours, qu’il n’est jamais allé non plus ni à Harlem ni à Soweto. Et c’est ça qui nous arrive. Ce qui nous arrive c’est ce qui arrive dans nos villages où les petites luttes fratricides entre cousins font perdre que le monde est plus grand, qu’on ne rêve plus d’une nation unie, d’une Afrique unie et de familles unies. Pourtant il faut rêver d’une Afrique meilleure, intègre, fraternelle, amicale, honnête… ce grand congolais que j’ai voulu célébrer à ma manière. Non Monsieur Jean de Dieu Momo vous n’allez pas me faire perdre mon panafricanisme, vous n’allez pas m’entrainer dans la spirale de la haine et de la violence qui constitue votre ADN quelque soit le camp qui est le vôtre, vous n’allez pas me faire haïr les congolais, car c’est de la haine des autres que vous vous nourrissez. Arrêtez de disséminer la haine et la violence partout où vous passez, notre pays et l’Afrique en a assez de la violence et de la haine. Ce soir mon pays le Cameroun joue contre le Maroc, je souhaite à mes frères Marocains nous ayant fait l’honneur de venir dans notre pays célébrer la fraternité du football avec nous de gagner ce match (malheureusement je n’ai pas pu trouver votre maillot)!