En 2013 naquit une nouvelle constellation dans l’univers stellaire de la Littérature : Les Grands Prix des Associations Littéraires.
On s’en souvient encore comme si c’était hier : Yaoundé, 7 janvier 2014, Institut français du Cameroun, la cérémonie de la première édition des GPAL a tenu toutes ses promesses, dont la présence de Guillaume Oyônô Mbia, président du Jury. Parmi les heureux lauréats rentrés dans l’histoire par cet événement inédit, figure en bonne place le Professeur Magloire Ondoa, consacré dans la catégorie Recherche pour ses travaux intitulés « Textes et Documents du Cameroun (1815 – 2012) ». Une œuvre titanesque qui avait été proposée au Jury des GPAL 2013 par le Club Kwame Nkrumah de l’Université de Douala, association créée en 2000 avec le concours de MM. Joël Etienne Atangana et Robert Anvene, alors étudiants dans ladite université. Le Club Kwame Nkrumah s’est toujours montré très actif dans les débats et conférences portant sur le Panafricanisme, la Philosophie, ou encore les sciences juridiques et politiques.
Dans le cadre de cette série désormais ouverte aux argumentaires des associations sur les œuvres primés aux GPAL, Le Bledparle vous propose ci-dessous le texte de soutien de candidature de l’œuvre de Magloire Ondoa aux GPAL 2013, signé par le Club Kwame Nkrumah de l’Université de Douala. Pour rappel, le dernier lauréat en date de la catégorie Recherche n’est autre que l’écrivain sénégalais Felwine Sarr, primé à l’édition 2016 pour son essai intitulé « Afrotopia », avec le parrainage du CLIJEC ; quant à la catégorie Belles-Lettres, Eric Mendi a été distingué une deuxième fois, notamment pour « AFANE – Forêt Equatoriale », un roman-documentaire proposé au Jury par la Maison de la Culture Québec – Cameroun ; Sankie Maimo a été honoré du Grand prix de la mémoire, Bernard Dadié est l’actuel détenteur du Grand Prix des Mécènes, et l’Association Gangotena est lauréate de l’Asso-Prize 2016.
CONTRIBUTBUTION DU CLUB KWAME NKRUMAH AUX GPAL 2013 :
« TEXTES ET DOCUMENTS DU CAMEROUN (1815-2012) », DE MAGLOIRE ONDOA
M. le Président du Jury,
Honorables membres du Jury,
« Dans un environnement où l’accès à l’information officielle est difficile, la situation des chercheurs, des décideurs et des citoyens est préoccupante. Les archives nationales sont à peine fournies ; les responsables du Journal officiel éprouvent des difficultés à reconstituer les stocks restés à Buea, son lieu initial de parution, les administrations hésitent à produire des documents à ceux qui en expriment la demande, sans qu’une commission d’accès aux documents administratifs leur enjoigne de le faire. L’information se propage et alimente l’ignorance ambiante. »[1]
Ces mots du Professeur Paul-Gérard Pougoué résument la situation que vient remédier le recueil des « Textes et Documents du Cameroun (1815-2012) », œuvre sur laquelle le Club Kwame Nkrumah de l’Université de Douala a jeté son dévolu pour participer à la première édition des Grands Prix des Associations Littéraires en cette année 2013.
En effet, M. le Président, Honorables membres du Jury, l’œuvre du Professeur Magloire Ondoa est une œuvre titanesque de textes et documents couvrant pour le moment cent quatre-vingt-dix-sept volumes et compilée en deux cent cinquante tomes. Il y a donc lieu de comprendre que toute tentative visant à présenter l’intégralité de cette œuvre dans le cadre d’un espace aussi réduit comme celui de ce concours serait inappropriée. Néanmoins, notre choix s’est porté sur cette œuvre, à cet effet notre attention s’est d’abord limité au volume I de l’œuvre dont le titre est Introduction historique au droit camerounais : La formation initiale. Eléments pour une théorie de l’autonomie des Droits africains. Toutefois pour saisir l’ampleur et la dimension de l’œuvre, des précisions sur le contenu des tomes en termes de volumes seront fournies. A travers ce volume qui tient office d’introduction générale aux deux cent cinquante (250) tomes du recueil des « Textes et Documents du Cameroun (1815-2012) », on peut déceler les grands intérêts de l’œuvre. En effet, dans une approche juridique et historique l’auteur nous livre une production abondante, intense et dense qui ne peut laisser aucun être humain spécialiste ou non des sciences sociales et encore moins des sciences juridiques et politiques indifférent. En parcourant les trois cent dix-neuf pages de cette introduction générale, on saisit les objectifs et buts que se fixe le Professeur en même temps que l’on découvre l’intérêt d’une telle livraison pour la société et l’Etat auquel s’attachent ces textes et documents, c’est-à-dire la République du Cameroun. En réalité, lorsque l’auteur tient ce que le Professeur Joseph Owona désigne par « pari insensé », la question d’un quelconque intérêt ne se pose plus, mais elle s’impose. De ce constat, toute entreprise intellectuelle qui accorde une attention à cet édifice juridique qui est probablement de loin le produit le mieux accompli de « l’école de Santa Barbara », ne peut que se faire à partir de la posture de tout observateur ou utilisateur. Pour ce qui nous concerne, trois grands aspects ont retenu particulièrement notre attention, à savoir les intérêts scientifiques, la densité et la transversalité de l’œuvre puis son utilité sociale.
Sur le premier moyen lié à la recherche, le Professeur ouvre sa collection en précisant que :
« Que les études juridiques africaines et africanistes soient essentiellement synchroniques et orphelines de perspectives diachroniques, n’est plus sérieusement discutable. Celles-ci qui soucieuses de découvrir les secrets des sources juridiques de l’histoire, afin d’en tirer les éclairages nécessaires à la compréhension des problématiques de leur temps, sont singulièrement rares. Elles rencontrent d’ailleurs des obstacles liés à l’inexistence des sources formelles sollicitées, ou exigées par la question à traiter et, par conséquent, escamotent leurs conclusions, ou raccourcissent leurs analyses et raisonnements. »[2]
Il ajoute également que :
« Cette situation n’est pas sans conséquence sur la pertinence des problématiques construites ou à construire, certes ; mais également, sur les résultats proposés. Parfois, faute d’éclairages historiques, ou fondés sur des données historiques tronquées et inexactes, ceux-ci découvrent leur inconformité à la réalité du Droit. Le fait rend de la sorte, encore plus urgent et indispensable, le développement de réflexions et études consacrées à la connaissance de l’histoire du Droit, en Afrique en général, et au Cameroun en particulier. »[3]
Ces phrases révèlent donc l’immense richesse de l’œuvre du Professeur Ondoa pour la recherche. Il est d’abord question de restituer une conscience juridique au droit africain et camerounais en particulier. Car, nul n’est besoin de rappeler ici que le Cameroun dont il est question dans cette étude a subi plusieurs influences qui ont quelque peu fait penser qu’on aurait affaire à un espace a-juridique et dans le cas contraire, l’on pourrait tout simplement se contenter des affirmations gratuites sans rapport immédiat avec les thèses avancées. En conséquence lorsque les données sont erronées, il y a de fortes chances d’aboutir au résultat inexact. La mise à disposition de tous ces documents s’inscrit en toute logique dans une entreprise d’objectivité dont l’absence rend la recherche subjective et les résultats non compétitifs à défaut de les disqualifier complètement. Ceci vient donc à juste titre lever un certain discrédit qui a souvent pesé sur la qualité des travaux qui sont faits par des chercheurs africains et par certains africanistes qui ont souvent eu à se prononcer l’Afrique en se basant sur des données partielles. En présence de ce travail d’archiviste, certaines problématiques jusqu’ici glissantes faute d’informations cohérentes seront envisagées et traitées de façon pertinente.
De même, cette restitution de la conscience juridique se conjugue tout aussi de la réaffirmation d’une théorie de l’autonomie du Droit africain qui vient prendre le contre-pied de la thèse du mimétisme qui a cours dans la majorité des nouveaux Etats africains qui étaient sous domination occidentale. A travers une lecture autonome du Droit africain et camerounais, il s’agit de comprendre que l’Occident dans son expansion colonial n’avait pas transposé mot à mot le système politique qui était en cours en métropole. Il s’est agi au contraire d’une construction hybride qui ne reflétait pas non plus les aspirations locales mais qui était destiné à maintenir les intérêts des puissances métropolitaines dans leurs possessions en Afrique. C’est ce droit que l’auteur désigne par « droit colonial ».
La dynamique de ce paradoxe à travers les « Textes et Documents » est d’ailleurs mise en exergue à travers une remise en cause dont les conséquences ne furent autre chose que les mutations et les transmutations dont la marche vers la naissance du « Kamerun », le condominium franco-britannique, le mandat, la tutelle, l’autonomie interne, l’indépendance, la réunification et l’unification en sont les éléments pertinents jusqu’à ce jour.
La densité et la transversalité quant à elles, apparaissent à travers des référents documentaires et textuels qui touchent les domaines aussi variés que ceux de la coopération Afrique Caraïbes Pacifique et Union Européenne[4], l’agriculture[5], l’ajustement structurel[6], les assurances[7], le code général des impôts[8], le commerce[9], la décentralisation[10], les conventions collectives de travail[11], la culture[12], la défense[13], le développement durable[14], la douane nationale[15], le droit civil[16], le droit communautaire[17], le droit des biens[18], les droits de l’homme[19], le droit OHADA[20], le droit pénal[21], le droit du travail[22], les élections[23], l’élevage[24], l’enseignement primaire et secondaire[25], l’enseignement supérieur et la recherche[26], les entreprises publiques[27], l’environnement[28], les établissements de crédit[29], l’évolution politique et constitutionnelle[30], les finances publiques[31], la fiscalité[32], la fonction publique[33], la formation professionnelle[34], la gouvernance[35], les gouvernements[36], Honneurs et distinctions[37], Industrie[38], Libertés publiques[39], Lois de finances[40], Marché public[41], Monnaie[42], Nations Unies[43], Organisation judiciaire[44], Organisation des ministères[45], Organisation territoriale[46], Planification et développement[47], Poids et mesure[48], Postes et télécommunications[49], Pouvoirs publics[50], Prix[51], Professions libérales[52], Protection de la fortune publique[53], Régime domanial[54], Santé[55], Sociétés[56], Sports et tourisme[57], Sûreté nationale[58], Traités et accords[59], Transports[60], Union Africaine[61], Urbanisme et construction[62] ; l’œuvre monumentale du Pr Magloire Ondoa va au-delà du Droit pour restituer une véritable théorie de la sociogenèse de l’Etat du Cameroun et par ricochet, il s’agit aussi d’une contribution à la consolidation de l’indépendance assurée par l’unité et l’effectivité du Droit.
Quoi de plus pour l’Etat et la société ? Il s’agit en outre des matériaux de travail dont la richesse est inestimable, car les différentes administrations ont ainsi de quoi harmoniser les décisions et les actes afin d’éviter les multiples contradictions qui apparaissent souvent au sein des textes régissant parfois le même objet. En tout état de cause le citoyen camerounais ou non camerounais se trouve ainsi servi. Au surplus, les mots permettant de témoigner toute la richesse de ce chantier herculéen, qu’on soit gouvernant ou non ne seront jamais trouvés.
M. Le Président du Jury, Honorables membres du Jury des GPAL 2013, vous comprenez à travers ces quelques lignes toute difficulté qu’il y a à parcourir deux siècles de vie trouble, intense et riche d’un Etat comme le Cameroun à travers la plume du Professeur Magloire Ondoa. Nous tenons tout d’abord à vous remercier de l’attention que vous avez bien voulu accorder à notre présentation tout en implorant votre indulgence pour l’élasticité qui nous a imposé l’exploration d’une œuvre qui se donne pour ambition d’être immortelle.
[1] Introduction historique au droit camerounais : La formation initiale. Eléments pour une théorie de l’autonomie des Droits africains. Préface de : Paul Gérard Pougoué. Avant-propos de : Joseph Owona. Envoi… de : Joseph-Marie Bipoum Woum. Coll. Doctrine africaine et malgache, Yaoundé, éd. Le Kilimandjaro, 2013, 319 pages, Introduction générale au recueil de « TEXTES ET DOCUMENTS DU CAMEROUN (1815-2012) P. Xii
[2] Introduction historique au droit camerounais : La formation initiale. Eléments pour une théorie de l’autonomie des Droits africains. Préface de : Paul Gérard Pougoué. Avant-propos de : Joseph Owona. Envoi… de : Joseph-Marie Bipoum Woum. Coll. Doctrine africaine et malgache, Yaoundé, éd. Le Kilimandjaro, 2013, 319 pages, Introduction générale au recueil de « TEXTES ET DOCUMENTS DU CAMEROUN (1815-2012) P. Xii
[3] Ouvrage op.cit.p.27
[4] Voir volume II
[5] Voir volume III
[6] Voir volume IV
[7] Voir volume V
[8] Voir volume VI
[9] Voir volume VII
[10] Voir volume VIII
[11] Voir volume IX
[12] Voir volume X
[13] Voir volume XI
[14] Voir volume XII
[15] Voir volume XIII
[16] Voir volume XIV
[17] Voir volume XV
[18] Voir volume XVI
[19] Voir volume XVII
[20] Voir volume XVIII
[21] Voir volume XIX
[22] Voir volume XX
[23] Voir volume XXI
[24] Voir volume XXII
[25] Voir volume XXIII
[26] Voir volume XXIV
[27] Voir volume XXV
[28] Voir volume XXVI
[29] Voir volume XXVII
[30] Voir volume XXVIII
[31] Voir volume XXVIII
[32] Voir volume XXX
[33] Voir volume XXXI
[34] Voir volume XXXII et XXXIII
[35] Voir volume XXXIV
[36] Voir volume XXXV
[37] Voir volume XXXVI
[38]Voir volume XXXVII
[39] Voir volume XXXVIII
[40] Voir volume XXXIX
[41] Voir volume XXXX
[42] Voir volume XXXXI
[43] Voir volume XXXXII
[44] Voir volume XXXXIV
[45] Voir volume XXXXV
[46] Voir volume XXXXVI
[47] Voir volume XXXXVII
[48] Voir volume XXXXVIII
[49] Voir volume XXXXVIII
[50] Voir volume XXXXX
[51] Voir volume LIII
[52] Voir volume LIV
[53] Voir volume LV
[54] Voir volume LVI
[55] Voir volume LVII
[56] Voir volume LVIII
[57] Voir volume LIX
[58] Voir volume LX
[59] Voir volume LXI
[60] Voir volume LXII
[61] Voir volume LXIII
[62] LXIV
Nous vous remercions pour votre aimable attention.