Décédée aux premières de ce 1er août 2024 des suites de maladies, Suzanne Kala Lobè reçoit d’ores et déjà les hommages des journalistes de l’univers médiatique camerounais. Martin Camus Mimb à travers un éditorial revient sur le parcours emblématique de la journaliste camerounaise. Le journaliste sportif peint quelques clichés des difficultés que la journaliste, membre du Conseil National de la Communication a rencontré dans l’exercice de son métier.
Lebledparle.com vous propose l’Édito de Martin Camus Mimb
L’ÉDITO DE FIN…
Cette dure a fini au milieu des ordures de Hysacam. C’est là-bas, qu’elle a eu un peu de reconnaissance pour services rendus à la nation, pour prendre sa revanche sur le journalisme qui lui a offert une exposition affamée. Non qu’elle avait des problèmes primaires de famine, mais c’est là-bas qu’elle trouvait la sécurité du quotidien, loin des humeurs patronales, caprices de potentats qui savaient sa passion intacte et son attachement médiatique indélébile, et qui en jouaient des fois pour la garder ordinaire. Elle a cherché longtemps à s’éloigner d’eux, mais sa passion la ramenait au point zéro, celui de la quête d’une tranche horaire, là où elle pouvait pousser un coup de gueule, consubstantiel à sa personnalité. Elle a donc pu avoir en guise de retraite d’une vie au service de la presse, un espace réduit à DASH, où on s’arrangeait à lui offrir un minimum qui lui permettait de jouer les arrêts de jeu de sa passion journalistique. Conduite sur ce terrain par Polycarpe Essomba qui n’a pas oublié cette plume, qui nous narguait avec son impertinence sur les antennes de Radio et Télé Equinoxe. Il l’a fait par reconnaissance, humanisme et volonté de mettre un nom fort, au fronton d’un jeune média en quête de croissance. La Suzanne que les jeunes ont vu dans ces couloirs, était aux antipodes de vie, de celle que nous autres avions connue. Mais c’était finalement le dernier et seul média, qui lui a dressé le dernier lit de son repos professionnel. Merci.
La Suzanne que nous autres avions connue, c’est celle qui pouvait tenir une émission baptisée « Polemos », et dont le titre trahissait l’ambition. On fait de la polémique, point barre. C’était donc Suzanne. Qui faisait le contrepied parfait de tout. Qui bâtissait son argumentaire sur les limites et les failles de la réflexion en face, qui trempait sa plume dans l’encre de la bipolarité d’une société qui voulait imposer à tous, un angle de vue, qu’elle contestait et de façon systématique. D’aucuns ont vu en elle sur ses derniers jours, un soutien au système en place. C’est parce que en fait, ils ne l’ont vraiment pas connus. Elle avait juste horreur des voix unanimes de réflexion. Elle s’arrangeait à baigner dans une sorte d’iconoclasme provocateur.
Et que dire de la syndicaliste ? Celle qui apostrophait sans gants Sévérin TCHOUNKEU dans une réunion, pour lui poser une question à priori lunaire sur la différence de niveau de vie entre lui et ses employés, mais qui dans le fond, n’avait que pour but de demander plus. Celle que des officines de journalisme ont combattu parce qu’elle leur balançait au visage et de façon permanente leurs contradictions de vie entre les critiques qu’ils formulaient le jour, et la mamelle qui les nourrissait la nuit. Cette femme, qui narguait le genre masculin de ne pas avoir été assujettie au mariage, d’aimer librement Bea Man Wayack son amour de jeunesse jusqu’à ses derniers jours, cette femme qui ne s’est jamais encombrée d’avoir pour elle une voiture, mais qui tournait en taxi course, comme une révolte contre la bourgeoisie.., Cette femme, fille de bourgeoise qui a choisi la sobriété et la vie sans calculs. Merci pour la dernière conversation toute fraîche sur mon orientation professionnelle. Je vais la garder jalousement, loin des oreilles indiscrètes. Ce sera mon héritage de ta vie tumultueuse dans la presse. Se faire appeler Ma’a Su, dans un environnement où les Brenda, Tatiana, Flora sont des modes de conformité, résume l’axe de ta vie sur cette terre. Va, et repose en paix!
Martin Camus MIMB
#NsangNkong
La Plume de Jésus