Cette déclaration est contenue dans une tribune libre publiée sur les réseaux sociaux ce lundi 19 août 2019, par l’Avocat Camerounais au Barreau de Paris, Me Christian Bomo Ntimbane. Cette tribune s’inscrit dans le sillage du débat qui a lieu en ce moment concernant la gestion des entreprises publiques et parapubliques au Cameroun, marqué par la récente correspondance du Ministre d’Etat, Secrétaire général à la présidence de la république Ferdinand Ngoh Ngoh qui demande aux DG et PCA dont le mandat est caduc de rester en poste en attendant la réaction du Chef de l’Etat. Lebledparle.com, vous propose l’intégralité de cette chronique juridique.
AFIN QUE NUL N’EN IGNORE
LES INSTRUCTIONS DU PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE NE SONT PAS SUPÉRIEURES À LA LOI.
Tous les actes posés par les présidents des conseils d’administration et des directeurs généraux des société d’Etat dont les mandats cumulés ont expiré depuis l’entrée en vigueur des lois du 12 juillet 2017 portant sur les établissements publics et les entreprises publiques et la fin du délai de mise en conformité d’une année qui leur a été accordé par les susdites lois, sont dorénavant nuls et de nul effet.
Les instructions attendues ou données par le Président de la république ne sont pas supérieures aux dispositions de la loi.
Même les actes pris par le Président de la république dans l’exercice de ses fonctions sont soumis, encadrés et autorisés respectivement par les lois et le droit en vertu de deux sacro-saints principes dits de légalité et de juridicité.
Si au Cameroun, la loi de la force peut permettre à ces responsables désormais sans qualité et capacité à agir de continuer à diriger ces structures, Il ne faut pas perdre de vue que la plupart des entreprises et établissements publics camerounais signent des conventions, contractent et font des opérations avec l’extérieur.
Les juridictions étrangères qui pourront être saisies pour différents motifs savent très bien que la loi camerounaise est au-dessus des instructions présidentielles.
Et même, on se souvient encore d’une affaire qui avait défrayé la chronique au Cameroun dans les années 1990.
Le premier Ministre d’alors Achidi ACHU avait transmis les hautes instructions du Chef de l’État, comme ils aiment bien les qualifier, au Ministre des Finances feu Justin NDIORO, pour lui demander de procéder à la cession des actions de la Sodecoton à une société appelée Smic constituée essentiellement des élites du grand Nord.
Le Ministre des finances dans un courage inédit opposa un refus d’exécution catégorique de cette instruction qui violait la loi.
La société Smic saisit les tribunaux camerounais, qui, tout aussi courageusement donnèrent gain de cause au Ministre des finances.
La Sodecoton ne fut pas cédée aux particuliers bénéficiaires d’une instruction présidentielle et resta jusqu’à ce jour dans le giron des sociétés d’État.
En outre, tout dirigeant social qui continue à poser des actes alors que son mandat est expiré encourt des poursuites pénales qui pourraient être déclenchées tôt ou tard, pour des faits qualifiés d’usurpation de titre ou de fonctions.
Les transactions financières de sortie d’argent qu’ils ordonnent alors qu’ils n’ont plus qualité pourront être constitutifs de détournements de deniers ou de biens publics.
Les instructions présidentielles qui leur permettent de continuer à occuper illégalement ces fonctions ne pourraient en aucun cas les exonérer de leur responsabilité pénale.
Il faut bien noter qu’en droit pénal, il est interdit de respecter un ordre illégitime c’est à dire un ordre illégal.
Les établissements bancaires et autres structures financières privées et leurs responsables qui continuent d’exécuter les ordres de ces dirigeants dont les mandats ont expiré pourront tout aussi faire l’objet de poursuites pénales pour coaction ou complicité, détournements de deniers ou de biens publics.
« Sed lex, Dura lex »