Dans une interview accordée à Jeune Afrique dans le numéro 3119 de décembre 2022, l’artiste-comédien de nationalité ivoirienne donne son avis les putschs en Afrique de l’Ouest, la crise entre Abidjan et Bamako et la situation sécuritaire dans la sous-région Afrique de l’Ouest. Interview mené par Aïssatou Diallo.
Vous jouez régulièrement dans la sous-région. Quel impact la crise sécuritaire a-t-elle sur votre secteur ?
Michel Gohou : La culture ne peut pas s’exporter dans les zones chaudes. Je prends l’exemple du Nord-Kivu, en RDC. J’étais à Goma avant la crise du Covid-19. Là-bas, les gens nous aiment bien et ils auraient un peu besoin d’humour. Mais à cause de l’insécurité, on ne peut s’y hasarder. C’est la même chose dans le nord du Burkina-Faso ou dans le nord du Mali.
Pour éviter que les groupes jihadistes s’installent en Côte d’Ivoire, les autorités misent sur des programmes en faveur de la jeunesse. Est-ce la solution ?
Nous devons tout essayer. Les jeunes se font enrôler car ils n’ont rien d’autres à faire. Les jihadistes leur offrent un « emploi » dans ce contexte où l’avenir semble bouché. Pensez-vous que celui qui gagnerait bien sa vie et arriverait à prendre en charge sa famille se laisserait séduire ?
Cela fait quatre mois que les militaires ivoiriens sont détenus au Mali, et la tension est vive entre Abidjan et Bamako.
Le Mali et la Côte d’Ivoire sont comme deux frères qui ont une prise de bec et se sont tourné le dos. Mais la famille reste la famille. Ils finiront par revenir à des bons sentiments. Les populations de nos deux pays sont entrelacées. Ce qui s’est passé est le fruit d’une incompréhension, on finira par s’entendre.
Un tambour parleur des Atchans va être restitué à la Côte d’Ivoire. Comment accueillir les œuvres pillés pendant la colonisation ?
Nous avons des Musées, et nos enfants ont eux aussi envie de voir ces œuvres, de connaitre l’histoire de leurs régions, de leur pays. Que l’on nous rapporte ce qui nous revient de droit.
Mais la question de leur conservation se pose…
Personne n’a à nous apprendre à entretenir nos masques.
La plupart des crises que la Côte d’Ivoire a traversées ces dernières décennies sont survenues lors d’élections. Est-ce inévitable ?
Même en Europe, à l’approche d’élections, il y a du remue-ménage. C’est normal qu’il en soit de même en Afrique, où nous apprenons encore à connaitre la démocratie. Dans cet apprentissage, souffrez qu’il y ait des grincements de dents.
Les coups d’Etat au Mali, en Guinée ou au Burkina sont-ils un recul pour la démocratie ?
C’est évident ! Un coup d’état n’est jamais salutaire. Lorsque cela se produit, il y a toujours des gens qui crient leurs joies, mais leur retourne trente ans en arrière. Il faut tout recommencer, tandis que les autres avancent. Les coups d’état sont à bannir. On peut s’entendre sans avoir à prendre les armes.