Dans une interview publiée ce 06 juin par Nadège Noah, la 2e vice-présidente du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), qui prend la tête du parti après l’emprisonnement de Maurice Kamto et Mamadou Mota –président et 1 er vice-président – expose sa biographie et ses nouvelles missions à la tête de la formation politique, qui maintient les manifestations du 08 juin au Cameroun.
Qui est Tiriane Noah ?
Tiriane Noah est une Camerounaise née à Yaoundé le 24 juillet 1980. Je suis du clan Yanda (département de la Mefou-et-Akono, région du Centre) et non Tsinga. Diplômée en histoire et en science politique après un parcours dans les universités de Yaoundé I et II. De multiples formations m’ont permis d’être polyvalente. Cela m’a valu un parcours professionnel assez riche dans les différents domaines, notamment assistante de direction, responsable commerciale, markettiste et communicatrice, etc.
Comment êtes-vous entrée en politique et particulièrement au Mrc ?
Mon entrée en politique est une espèce de révolte contre les injustices, l’arbitraire et la misère qui règnent autour de moi. Je me suis engagée en politique pour donner aux plus jeunes la chance que je n’ai pas eue. Imaginez le désespoir d’un jeune qui s’est sacrifié pour aller à l’école et qui se retrouve à la retraite avant d’avoir eu un emploi, frappé par la limite d’âge de présentation aux concours et pendant ce temps, des gens dont la mort seule peut sanctionner le départ en retraite jouissent de tous les avantages. Quand vous voyez un enfant mourir parce qu’il a manqué un comprimé de quinine ou de paracétamol, une femme mourir pendant qu’elle donne la vie juste parce qu’elle ne peut pas payer une césarienne, être prisonnière à l’hôpital parce qu’elle n’a pas pu payer les frais d’hospitalisation et pendant ce temps on met à disposition des avions médicalisés pour certains… Quand vous voyez des gens boire de l’eau dans les mêmes mares que les boeufs, on ne peut pas rester indifférents. Le portail des camerounais de Belgique. Des jeunes filles dont la vie est pratiquement mise entre parenthèses parce qu’elles sont mères. Des denrées alimentaires qui pourrissent et ne sont pas écoulées pour défaut de routes. Les libertés confisquées et bafouées, des crimes et assassinats jamais élucidés, en attendant qu’on ait aussi notre série des « enquêtes impossibles » … J’en citerais comme cela en n’en plus finir. Et pendant ce temps, des dynasties de détournements de fonds se sont installées. Des gens qui réussissent à des concours sans jamais concourir, morts dans certains cas. Des milliards enterrés dans des sacs, des femmes victimes de violences qui ne sont pas protégées, la marginalisation de certains au Cameroun ; notre pays qui s’enlise de plus en plus dans des crises, etc. Tout cela ajoute aux prières faites chaque jour pour que les conditions de vie soient améliorées dans notre pays, le besoin d’agir et de participer ainsi à une nouvelle ère. Une ère de justice, de vérité et de paix. C’est ce qui m’a conduit dans la politique et principalement au Mrc dont le projet de société répondait exactement à mes aspirations. C’est pourquoi j’y suis, par conviction. Les qualités d’homme du président Kamto m’ont conforté dans cet engagement. J’ai adhéré à l’idéologie du Mrc et je m’y suis engagée.
Jusqu’ici quel rôle avez-vous joué pour la marche du parti, puisqu’on n’entend pas très souvent parler de vous ?
Jusqu’à ce jour, je me suis acquittée des responsabilités à moi confiées dans le cadre des activités du parti et principalement du directoire qui travaille en collégialité. Je suis d’abord militante. Ma mission est de faire connaître, aimer et accepter les idées de mon parti et le présenter partout où besoin s’en fera pour un Cameroun meilleur, riche et prospère. En tant que 2e vice-présidente nationale du Mrc, je suis donc dans le présidium du parti après le président national, le professeur Maurice Kamto, et le 1er vice-présent, Mamadou Mota. Étant donné que la politique c’est d’abord sur le terrain et non seulement dans les médias, ce qui ajoute à ma personnalité une personne discrète. D’où ma presque absence sur la scène publique.
Aujourd’hui présidente par intérim, par la force des choses, pensez-vous avoir les coudées franches pour assumer une telle responsabilité ?
Il faut que les choses soient claires. J’assure l’intérim de la présidence du parti sous la supervision du professeur Kamto qui est le président élu lors de la convention de 2018. Et je peux vous assurer que je bénéficie de sa confiance et de celle de tout le directoire ainsi que de celle des militants qui ne cessent de me témoigner à chaque instant leur soutien. Je voudrais en outre vous rappeler que contrairement à certaines formations politiques qui ont à leur tête des dieux, la direction du Mrc est assurée par un directoire national et les décisions sont prises de manière collégiale. Cela démontre aisément que le Mrc est un parti bien plus structuré. À partir du moment où j’ai été élue 2e vice-présidente nationale du Mrc, j’ai compris et j’ai su que je porterai désormais la responsabilité de le conduire dans une ère nouvelle. Je sais les responsabilités qui sont miennes et je compte bien les assumer avec la grâce divine et le soutien de tous ceux qui ont besoin d’un Cameroun plein de vie, de libertés et d’espoir. Voici notre message : nous voulons la libération immédiate et sans condition du président Maurice Kamto, de tous nos leaders, de tous nos militants et tous les Camerounais incarcérés dans le cadre de la crise anglophone. Nous demandons la fin de la gabegie et la fin du gaspillage des biens publics. L’exigence de la réforme consensuelle de l’ensemble du système électoral avant l’organisation d’une quelconque élection. L’exigence d’un audit sur la gestion calamiteuse des milliards de la Coupe d’Afrique des nations (Can) 2019, finalement retirée à notre pays. Sans oublier la libération des leaders des organisations alliées de la coalition gagnante autour de Maurice Kamto.
Vous êtes originaire de la région du Centre, et pourtant certains présentent le Mrc comme un parti tribal. Qu’en dites-vous ?
La présentation du Mrc comme un parti tribal est une construction du régime qui se nourrit du tribalisme pour se maintenir. Vous savez les paroles s’envolent et les écrits restent. C’est pourquoi il faut lire « L’urgence de la pensée » du professeur Maurice Kamto pour comprendre ce qu’il pense du tribalisme, ses convictions profondes et sa démarche d’aujourd’hui.
La plupart des cadres du Mrc sont aujourd’hui en prison. Ne craignez-vous pas de subir le même sort ?
Le combat pour la justice et la liberté est un combat permanent. Et l’injustice a ceci de particulier qu’elle rend ses victimes plus fortes. Le Mrc, ce n’est pas que des hommes. Mais un état d’esprit. Et on ne décapite pas un esprit. Des Kamto, des Noah, des Mota, des Ndoki, etc., il y en a des milliers dans le Mrc. Quand on s’engage dans un combat juste, on n’a pas peur de la mort. Pourtant la prison n’est pas pire que la mort.
Quels sont vos défis les plus immédiats en tant que présidente par intérim du Mrc ?
Mon objectif est de maintenir les troupes mobilisées et veiller au respect des valeurs de paix, d’unité et de prospérité pour notre pays. S’agissant de la marche blanche annoncée, je vous donne rendez-vous le 08 juin.
Publié le 06 juin par Nadège Noah