«En 1998, Aimé Jacquet n’a pas convoqué Ginola et Cantona. Il a pourtant gagné la coupe du monde».
Voilà la ritournelle préférée qui défilent en boucle comme un « tube d’été » dans les commentaires et les pages Facebook, de ceux qui y ont trouvé le moyen de justifier et légitimer l’éjection de Michael Ngadeu Ngadui de la liste des 26 Lions indomptables appelés à défendre les couleurs du Cameroun à la coupe du monde Qatar 2022.
Qu’il me soit permis de rappeler un truisme: comparaison n’est pas raison.
Il faut bien se souvenir qu’en 1998, Jacquet ne laisse pas Cantona par pure fantaisie !
On le sait. Il y avait une rationalité derrière ses choix et ses non choix.
L’entraîneur des bleus d’alors voulait éviter à son groupe de pâtir de la «grosse personnalité» de Canto: le « bad boy ».
Mais alors, quand on s’appelle Jacquet et se paie le luxe de faire une liste sans Canto en 1998, après un Euro 1996 réussi, c’est parce qu’on a dans sa besace, le [déjà prometteur Djorkaeff], le déjà excellent Zidane, le truculent Pirez, et le majestueux Petit, dans un milieu de terrain qui faisait pâlir de jalousie, le monde entier. Voilà la réalité. C’est la vérité !
En matière de sélection de joueurs, ce n’est donc pas seulement celui qu’on laisse qui fait problème !
C’est souvent celui qui le remplace qui fait douter. Jaser!
Ce n’est pas le fait de laisser un joueur à la maison qui choque ! C’est l’impression de l’arbitraire du choix ou du non choix d’un joueur qui est écoeurant.
Même si certains croient pouvoir se donner bonne conscience, en disant qu’ils «respectent le choix de l’entraîneur», il me plaît de signifier que les choix d’un entraîneur de football ont vocation à être questionnés, décryptés, et mis en perspective. Pas à être «respectés». Au sens obséquieux, où ils l’entendent.
Qu’on nous dise pourquoi Ngadeu, alors qu’il est le meilleur à son poste, brille en club, est intelligent et de très bonne moralité, a tout donné pour cette équipe, ne peut pas représenter son pays à une heure si décisive, et doit (avalant des couleuvres) être remplacé par Nkoulou qui ne lui arrive pas à la cheville ?
Qu’on nous l’explique, pour qu’on la boucle une fois pour toute, bon sang !
Il est vrai que lorsqu’il s’agit de choisir, la subjectivité est de mise, et l’arbitraire n’est jamais vraiment loin.
Toutefois, il faut toujours se garder de donner à l’arbitraire, la caution de l’intelligence, l’objectivité ou la pertinence et la clairvoyance qu’il n’a pas.
Sous d’autres cieux, les entraîneurs assument la part d’arbitraire qui les travaille [le cas Deschamps – Benzema] et « meurent » ou réussissent avec leurs choix contestés et contestables.
Chez nous, non seulement on dissimule la subjectivité et l’arbitraire sous les oripeaux du secret d’Etat; mais encore, n’en tire jamais les conséquences qui s’imposent quand l’arbitraire vient à faire pschitt !
C’est absurde !
Luc Perry Wandji.
Journaliste.