Au mois de novembre, le corps électoral pour les municipales et législatives de 2020 pourra être convoqué par le Président de la République. Jusqu’ici la paix n’est pas encore d’actualité dans les régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest. Comment les élections législatives et municipales dans les conditions actuelles de guerre civile généralisée dans ces deux régions ? C’est la grande question qui vaut son pesant d’or. Le politologue Siméon Roland Ekodo Mveng a proposé ce jeudi 24 octobre une réflexion dans ce sens sur son mur Facebook. Lebledparle.com vous propose l’intégralité de la réflexion.
« Du point de vue de l’éthique républicaine et de la gouvernance intégrée, c’est indécent et cyniquement opportuniste de parler du vote des législatives et municipales au Cameroun aussi longtemps que le Nord-Ouest et le Sud-Ouest seront en combustion et que ce code électoral restera comme tel. L’esbroufe du pouvoir en place et l’imposture actuelle des acteurs politiques de l’opposition d’y prendre part ultérieurement ne peuvent plus masquer leur fuite en avant et leur indifférence sadique aux intérêts nationaux sub partisans et aux urgentes problématiques de l’heure. Une construction sur du sable qui fera d’ailleurs retomber nombreux sur leurs pattes arrières. Selon les jurisprudences de 1992 et d’octobre 2018 on peut postuler dans ces conditions de température et de pression qu’une dépendance aux sentiers contentieux produira toujours l’illégitimité du régime et l’imbécilité des formations concurrentes. De plus, organiser après la présidentielle, un scrutin couplé en l’absence notable de deux régions anglophones importantes du microcosme politique consacrerait d’ailleurs l’idée d’une exclusion sans vergogne voire d’une sécession au-delà des débats secondaires sur l’arbitrage du jeu électoral et sur la reconnaissance des élus par ceux qui ploient sous le feu des balles. Quelle signification donner à une fête démocratique comme le vote quand certains pleurent leurs parents, biens, amis et connaissances ? Incidemment, le parlementarisme rationalisé ailleurs devra cesser d’être en Afrique un simple et vulgaire exercice d’accréditation de dirigeants fantoches et prébendiers aux assemblées populaires. L’ontologie d’une agora au sens substantiel et procédural fait en effet de la représentation un sacre institutionnel et un rituel dans lequel l’élu, comme le diplomate et militaire, prête un serment d’attachement loyal au cahier de charges de sa circonscription administrative voire aux aspirations du pays tout entier. Le profito-situationnisme égoïste et la participation mercenaire et vandale au jeu démocratique distinguent dans cette perspective, les politiciens véreux des hommes d’État respectables et respectueux des cadres agréés de dévolution du pouvoir. Le seul exemple du Ghana montre qu’une autre Afrique est possible et que le respect d’une classe politique se mérite ».
Siméon Roland Ekodo Mveng, Socio-politiste