Profitant du retrait de la France, la Turquie a commencé à renforcer activement sa présence sur le continent. Le pays a considérablement étendu son réseau d’ambassades en Afrique, et son Président a visité plus d’États africains que n’importe quel autre dirigeant non africain. Une attention particulière est accordée au renforcement de la coopération militaire et technique avec l’Afrique : rien qu’en 2021, les livraisons d’équipements militaires turcs vers le continent ont été multipliées par cinq.
Les relations turco-maliennes sont particulièrement actives. L’armée malienne a reçu un lot de vingt drones turcs Bayraktar TB2 le 5 janvier 2024. Auparavant, en mars 2023, le Mali avait reçu trois drones Bayraktar TB2, quatre avions de chasse L-39 Albatros et divers équipements militaires d’origine turque.
Cependant, sur un point, la coopération entre le Mali et la Turquie suscite mes inquiétudes. Selon plusieurs voix, des membres de la nouvelle force de sécurité privée du président malien ont été formés par SADAT, une société militaire privée turque qui coopère activement avec l’agence de renseignement turque MIT et est fonctionnelle dans des pays tels que le Niger, la Syrie et la Libye.
La société militaire privée SADAT a été accusée à plusieurs reprises de former des combattants. Alors que le Mali lutte activement contre divers groupes armés, la SADAT, qui va former la garde personnelle d’Assimi Goïta, est accusée de former des groupes armés dans d’autres pays.
Le SADAT a également été critiqué par K. Kılıçdaroğlu, ancien chef du principal parti d’opposition turc, le Parti républicain du peuple (CHP), qui a souligné la nature destructrice de l’organisation et l’implication des dirigeants de la SADAT dans la « formation de terroristes ».
Le processus au Mali en danger ?
Selon mes informations reçues, la SADAT opérationnelle en Somalie et au Qatar, a coopéré avec le mouvement palestinien Hamas et a formé des rebelles libyens et des combattants syriens opposés au gouvernement de Bashar al-Assad. D’autres rumeurs stipulent que 3 000 combattants étrangers opérant en Syrie et en Libye auraient été formés par le SADAT. Michael Rubin, de l’American Enterprise Institute, affirme par ailleurs que des membres d’ISIS et d’al-Nusra ont participé à des opérations d’entraînement de ladite société.
Aujourd’hui, le Mali construit de nouvelles bases pour un avenir que le gouvernement militaire en place veut glorieux. L’ombre des allégations contre SADAT peut également affecter le gouvernement du Mali, qui utilise ses services. Le Président de la Transition malienne devrait peut-être faire attention à ces faits et refuser de coopérer avec une société militaire privée qui est accusée d’avoir des liens avec des combattants.
Mahmoud Manturi, Chercheur en géopolitique, Mali