Souvent mal compris, d’autres fois incompris et quelques fois incompréhensible, Gabriel Zabo traverse une compétition plus-que mouvementée ; Hué, Conspué, vilipendé et même Conspiré, « El Tactico » est la énième victime d’un « Cameroun » en mal de patience et à l’appétit effréné pour la Gagne: Chronique d’une aventure ambigue par Denis Ikoul.
Héritier d’une équipe en mal dans sa transition, Gabriel Zabo arrive à la tête de l’encadrement technique des lionnes en juin 2021, et doit sonner la révolte dans le jeu des lionnes considéré comme pauvre et stéréotypé. Dans un contexte marqué par une identité du style « Kick and Rush » mise sur pied par son prédécesseur, le natif de Ngaoundéré doit permettre à cette équipe qui tarde à « faire le deuil » des Enganamouit, Christine Mani, Ngono Mani et autres Raïssa Feudjio (en conflit avec son poids), de franchir un cap important dans sa maturité technico-tactique, en adoptant un style de jeu plus digeste et chatoyant .
Il faut pour cela continuer d’injecter des jeunes, chose qui passe nécessairement par une transmission progressive du témoin des anciennes en mal dans leur hygiène de vie pour la plupart et embusquées dans des scandales de mœurs, mais aussi secouées par le poids de l’âge. Bien aidé par un championnat féminin en plein décollage avec l’appui du sponsor GUINNESS, on va facilement voir de nombreux visages locaux rejoindre la tanière. Monique Ngock, titulaire indiscutable dans cette CAN en est la parfaite illustration. On voit par des actes concrets la volonté d’opérer la transition, mais, prisonniers de nos « Camerounités », on veut tout en même temps: le beurre et l’argent du beurre.
Dans l’illusion d’invincibilité de Gabriel Zabo Toze !
Comme beaucoup de sélectionneurs en charge des différentes sélections nationales du Cameroun, l’accent leur est systématiquement mis, même de façon tacite, sur la Gagne. Au sein de l’opinion publique comme auprès des dirigeants, les camerounais pour la plupart n’acceptent jamais ou presque, de « perdre pour apprendre » et mieux revenir dans le futur. Pour le cas des lionnes et Zabo, El Tactico est selon toute vraisemblance, la nouvelle victime de notre exigeance exacerbée et irréaliste. Laquelle (exigence) est le fruit d’une relation affective qui s’était nouée entre les camerounais et «La génération Karl Enow Ngachu» depuis 2015 au mondial.
En effet, ce que les leaders d’Opinion ne disent pas ou disent très peu au Camerounais, c’est que pour atteindre ce niveau de performance en 2015, Karl Enow Ngachu a dû attendre 12 ans (car nommé en 2003). Il a donc eu le temps de travailler dans l’ombre avec plusieurs générations de filles, loin de l’exigence actuelle, pour finalement, à partir de 2015, parvenir à ce résultat. Sa première finale face au Nigeria en 2004, il a été surclassé 5-0 par les Super Falcons. Mais il a eu le temps d’apprendre de ses erreurs, se bonifier, pour au fil des années réduire l’écart avec le Nigeria. La moralité dans cette expérience de Enow Ngachu est que: «le succès n’est pas l’émanation d’un décret; il se construit à travers des échecs »; on apprend à gagner.
Zabo comme tout entraîneur est perfectible
Il est donc urgent de permettre à Gabriel Zabo de travailler, travailler dans la durée, dans un environnement sain, avec un contrat en bonne et due forme (il n’en a pas jusqu’à ce jour), et attendre les résultats après un temps bien défini. Zabo comme tout entraîneur est perfectible; il peut apprendre de ses erreurs. Mais pour y parvenir, il faut un public réceptif et mieux éduqué par ses leaders d’Opinion, ainsi que des dirigeants visionnaires et non émotifs.