Paul Mahel : « Comment comprendre que notre parc automobile soit à 85% constitué de voitures de plus de 10 ans ? »

Le journaliste Paul Mahel  dit s’éloigner momentanément des sujets politiques qui créent ces temps des clivages et des tensions au Cameroun. Dans une chronique publiée ce 04 février 2019, il s’intéresse aux « vielles choses » à l’instar de voitures, meubles (…) qui envahissent notre société. Il croit savoir que nombre de personnes y attachent naturellement du prix, mieux qu’aux objets neufs.

« C’est à croire que nous avons un attachement particulier pour les vielles choses. Sinon comment comprendre que notre parc automobile soit à 85% constitué de voitures de plus de 10 ans, que la friperie ait le vent en poupe et que la brocante aujourd’hui nous envahisse ? Certains me diront que c’est le manque de moyens mais à ceux-là je réponds catégoriquement NON ! », écrit-il dans un passage.

Le texte ci-dessous :

MA VIEILLE RICHESSE

Parce que tous les sujets qui touchent de près ou de loin à la politique sont clivant et déchainent les passions, j’ai décidé de consacrer toutes mes publications de la semaine à des faits divers, histoire tenter de détendre cette atmosphère déjà fortement tendu et apporter un peu de douceur dans ce monde de brutes. Commençons aujourd’hui par un phénomène qui nous entoure mais auquel nous n’accordons sans doute aucune attention.

Dans quasiment tous les quartiers de ce pays, il y a toujours une vielle voiture qui est garée quelque part et qui finit par devenir un lieu de repère. Cette voiture appartient le plus souvent à un vieux du quartier qui jadis fût «quelqu’un », et elle symbolisait alors, comme c’est très souvent le cas, un des signes extérieurs de richesse de notre «Akao Manga ». Sauf que un jour la voiture fut garée et n’a plus jamais redémarrer sans que personne (même pas l’épouse et les enfants du proprio » ne sache pourquoi. Seul le vieux sait et en général quand vous discutez avec lui, il a l’histoire de cette voiture qui très souvent a aussi une valeur sentimentale, mais il a aussi des projets parce qu’il ne désespère pas de la faire encore rouler un jour. C’est la raison pour laquelle la voiture est fermée à clé, la clé soigneusement gardée et tous les enfants du quartier savent que si tu tentes de jouer à côté de ce vieux tas de ferraille tu es mort.

Autant dans chaque quartier il y a cette vieille voiture, autant dans chacune de nos maisons, il y a des choses dont nous ne nous servons plus depuis des années mais dont nous avons du mal à nous débarrasser. Dernièrement je suis allé rendre visite à une tante et j’ai trouvé, soigneusement rangé dans un des tiroirs, un calendrier de la BIAO (les jeunes passez !) de 1984 qu’elle refuse catégoriquement de jeter. C’est à croire que nous avons un attachement particulier pour les vielles choses. Sinon comment comprendre que notre parc automobile soit à 85% constitué de voitures de plus de 10 ans, que la friperie ait le vent en poupe et que la brocante aujourd’hui nous envahisse ? Certains me diront que c’est le manque de moyens mais à ceux-là je réponds catégoriquement NON ! C’est une question de choix. Il y a des gens qui achètent des voitures d’occasion à 30 Millions alors qu’avec cette somme tu as une voiture neuve chez l’un des concessionnaires de la place. D’autres achètent des salons de 2 Millions à la brocante pourtant nous avons de bons fabricants de meubles locaux qui peuvent leur en fabriquer de très bons pour un prix moindre. Quant au vêtement, je connais des couturiers locaux qui font des merveilles à des prix extrêmement abordables

Loin de moi ce matin l’idée de critiquer les choix de qui que ce soit, juste attirer l’attention de ceux qui ne savent peut-être pas que même avec des moyens modestes on peut s’offrir du neuf car nous y avons tous droit.