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Protais Ayangma Amang : « [Paul Biya] a glissé sur les principales préoccupations des Camerounais » dans son discours de fin d’année 2018

protais ayangma amang

Le Président du Conseil d’administration de la South Media Coorporation (SMC), entreprise éditrice du journal Mutations a signé l’éditorial de ce quotidien parution de ce lundi 7 janvier 2019. L’assureur est revenu sur le discours du 31 décembre 2018 et pense que le Chef de l’Etat n’a pas abordé les préoccupations des camerounais. Bien plus, il a évoqué le dernier réaménagement gouvernemental et selon lui, c’est un « non-évènement ».


protais ayangma amang
Protais Ayangma Amang – DR

Glissements

Lorsque le directeur de publication de Mutations me demande il y a quelques jours, d’écrire, comme il est de coutume depuis quelques années, le premier éditorial de l’année, je lui réponds que je ne suis pas inspiré. Faute de lisibilité, de visibilité et encore moins de prévisibilité de la situation de notre pays.

Nous nous sommes alors naïvement imaginés que l’adresse présidentielle de fin d’année serait plus éclairante. Malheureusement, malgré l’effet d’attente, ce discours aura été peu marquant et peu inspirant. Très difficile, dans ces conditions, de se projeter avec enthousiasme et optimisme.

Rien ou si peu sur la crise anglophone, qui devient endémique, et se chronicise avec un risque de contagion de plus en plus probable au reste du pays. Rien ou si peu sur le retrait de l’organisation de la Can 2019, qui aura plongé tout le pays dans une profonde consternation. Rien sur les grandes opportunités qui constituaient pourtant la grande promesse du candidat Biya. Le président a …glissé sur les principales préoccupations des Camerounais: aucune grande annonce, pour un septennat que lui-même considère comme décisif.

C’est au contraire le statu quo, malgré l’urgence et la dégradation de la situation socio-économique. Sur la crise anglophone, une prise de position qui valide l’obsession sécuritaire des faucons. Si l’appel à déposer les armes n’est pas entendu menace-t-il, il donnera des instructions pour neutraliser ce qu’il appelle les « entrepreneurs de guerre ». Que ne l’a-t-il fait depuis deux ans?

Un célèbre homme politique camerounais, aujourd’hui disparu, ne disait-il pas: « quand on se noie, on s’accroche même au serpent»? Sommes-nous si éloignés du naufrage?

Il est dommage qu’on n’ait pas voulu donner sa chance à la seule rare initiative qui ait émergé dans ce naufrage collectif: celle du Cardinal Tumi, homme charismatique et respectable, s’il en fut! Nous devrions tous nous mobiliser derrière lui et cette initiative. Car, comme le disait Franklin Roosevelt, ancien président des Etats-Unis : « Il y a pire dans la vie que de n’avoir pas réussi, c’est de n’avoir pas essayé ».

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Les mesurettes, comme les libérations à dose homéopathique, ont montré leur inefficacité. Des mesures plus radicales s’imposent: l’amnistie générale, le dialogue inclusif y compris bien entendu avec les sécessionnistes, une large autonomie des régions concernées et pourquoi pas un gouvernement d’union nationale?

Paul Biya n’a-t-il pas dit qu’il était un « mendiant de la paix »? Que fait un mendiant, sinon supplier, accepter les humiliations? Il ne menace pas, ne pose pas de conditions!

Après la terrible humiliation du retrait de l’organisation de la Can à notre pays, nous espérions que le président de la République, à l’occasion de ce message du nouvel an, nous mettrait un peu de baume sur cette blessure encore béante, et qui risque de se révéler incurable.

Même pas l’annonce d’une enquête pour essayer de comprendre ce qui s’est passé, dégager les responsabilités, confirmer ou infirmer les chiffres affolants qui circulent autour des marchés de la Can…

Nous avions été quelques-uns du secteur privé complètement noyés dans ce machin sans pouvoir, appelé Comité de pilotage des Can féminine et masculine ( COMIPCAN) à proposer que la Can soit gérée comme un projet privé avec un chef de projet, choisi en fonction de ses compétences et de sa personnalité. C’est à peine si nous n’avons pas été expulsés de la salle; et les plus gênants d’entre nous ont souvent été « oubliés » lors des convocations aux réunions ultérieures. Surtout après le succès relatif de la Can féminine qui nous a relégués définitivement au rang de parias. Il est à craindre que si rien ne change, les mêmes causes produisent les mêmes effets et qu’en 2021, il y ait encore un glissement de date…

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Enfin, après l’élection présidentielle d’octobre, qui a connu une mobilisation sans précédent, et l’illusion de l’émergence d’une nouvelle classe politique plus jeune et engagée, nous avons été nombreux à penser, sans doute de façon candide, que plus rien ne serait comme avant. L’espoir n’aura duré que le temps d’une rose! Les premières nominations intervenues à l’Enam et dans certaines sociétés d’Etat perpétuent les mêmes mauvaises pratiques qui, au-delà des compétences réelles ou supposées de certains promus, ne sont pas exemptes de suspicion de népotisme.

Pourquoi ne pas mettre en place, pour certains postes de la Fonction publique et certains établissements publics et sociétés d’État ou d’économie mixte, un système transparent de nominations avec appels à candidature et sélection par un cabinet indépendant?

Il en est de même de ce non-événement qu’est le réaménagement gouvernemental qui intervient non seulement trois mois après l’élection présidentielle, et qui s’est limité à un très léger lifting périphérique, en lieu et place d’un nouveau gouvernement et qui a douché jusqu’aux inconditionnels du régime.

Même l’opposition qui nous a fait rêver le temps d’une campagne ne fait guère mieux. Quand elle ne s’emmure pas dans des postures suicidaires et chimériques, elle s’adonne à son jeu favori d’auto-destruction, au lieu de se préparer pour les importantes échéances prévues cette année.

L’année risque donc d’être très difficile sur le plan économique. Pas de Can, avec ses opportunités pour les Pme, l’artisanat, le tourisme, l’hôtellerie…Une loi de finances qui, contrairement aux promesses du ministre des Finances, est grosse de nombreux problèmes, des finances exsangues, la crise anglophone avec ses conséquences socio-économiques…

Je nous souhaite donc, pour la nouvelle année, beaucoup, mais alors beaucoup de courage! God save Cameroon!


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