Dans une tribune publiée sur Facebook le mercredi 22 juillet 2020, l’artiste musicienne et ancienne karatéka continue de dénoncer les violences sexuelles dans le monde du karaté. Dans sa cinquième livraison, elle salue l’initiative du cercle des ceintures noires du centre qui dénoncent ces abus. « La démarche initiée par le cercle des ceintures noires du centre pour soutenir les victimes de violences sexuelles, chantage, tentatives de viols, atteinte à la pudeur et d’abus divers est à féliciter et à encourager », écrit-elle.
Lebledparle.com vous propose l’intégralité du texte.
LES VIOLENCES SEXUELLES AU SEIN DE L’ÉQUIPE NATIONALE DE KARATE : un secret de polichinelle
La démarche initiée par le cercle des ceintures noires du centre pour soutenir les victimes de violences sexuelles, chantage, tentatives de viols, atteinte à la pudeur et d’abus divers est à féliciter et à encourager.
Plus jamais ça dans le karaté camerounais APPEL À TÉMOINS!!!
Tu es d’où (origine), tu t’entraines chez qui? tu habites où ? Tes parents font quoi dans la vie? Tu fréquentes où ? Pourquoi tu ne me cherches pas ? Tu ne veux pas aussi voyager? Le karaté c’est bien mais ce n’est pas suffisant! À ce stade de sélection vous avez toutes le même niveau, mais tout le monde ne peut pas voyager!!!
PART 5
Je me dis intérieurement, « hum s’il faut même voyager pour aller représenter le Cameroun à l’étranger, je vais faire comment avec mon examen? Je vais tourner quel film pour faire gober ça à maman »?
Naïvement je leur répondis qu’il faudrait s’adresser à ma maman afin qu’elle m’autorise à quoi que ce soit. Et un des responsables de la fédération de renchérir en riant :
-tu as quel âge Andella?
-18ans!
-Une vieille fille comme toi, 18 ans on doit encore aller voir ta maman tu es un bébé ? Quand on t’appelle à l’équipe nationale, tu dois devenir responsable. Tu ne vois pas les autres qui se battent pour entrer là ? C’est une faveur qu’on t’a faite et ça peut changer à la prochaine sélection si tu n’es pas coopérative.Tu es déjà une femme, tu n’es plus un enfant, tu peux déjà accoucher!
Je me dis alors intérieurement, les gens ci ne connaissent même pas « l’Éducatrice »! C’est ainsi que certains karaté-kas proches de moi avaient baptisé ma mère. Et eux parcourant ma morphologie de bas en haut d’enchaîner :
-il ne faut pas déranger Andella, il faut demander aux autres comment ça se passe, il faut bouger, ne reste pas dans ton coin! C’est comme en kumité, n’est-ce pas quand tu attaques tu vas chercher ton adversaire? Tu es prête à tous les enchaînements pour gagner ta compétition ou pas?
Je répondis que oui de la tête et il continua :
-il faut me chercher, je t’ai dit de me chercher, tu as besoin de quelqu’un pour veiller sur toi c’est comme ça que ça marche ici!
Pendant que les autres responsables assis face à moi me regardaient un sourire malicieux en coin, il me dévisagea et dit :
-tu vas me garder quoi?
Silence… et d’un air un peu perdu je répondis :
-je ne sais pas maître!
En chœur, Ils éclatèrent tous de rire et un des responsables de me faire le geste de la main
-va t’entrainer fille à maman…
Le stage externe se déroula sans problème et finalement un mois plus tard, j’étais retenue pour le stage bloqué. C’est à ce moment précisément que j’appris que le championnat d’Afrique pour lequel nous nous donnions tant de mal se tiendrait à Yaoundé au palais de congrès. À l’hôtel le paradis où nous logions, le lendemain de notre arrivée, je contractai je ne sais par quelle magie une gastroenterite qui dura tout le temps du stage restreint jusqu’au jour du championnat. Je perdis encore des kilos et j’avais de moins en moins d’équilibre. Je me sentais très faible et pas suffisamment de niaque pour compétir. Je perdais de jour en jour l’espoir de me voir alignée dans l’équipe définitive et de glaner un titre africain. Cependant durant ma maladie, j’entendais et je vivais indirectement des choses inadmissibles, loin de tout soupçon, loin du regard des parents, des familles, loin de tout, plusieurs jeunes femmes de ma tranche d’âge et parfois aussi mes aînées subissaient un chantage et un harcèlement sexuel permanent de la part de certains encadreurs sous la responsabilité de qui nous étions placées, mais également de hauts cadres de la fédération qui prétextant des visites d’encouragement à l’équipe, profitaient pour poser des actes ignobles.
Plusieurs fois, j’avais surpris des conversations entre une athlète persécutée par les avances de responsables de la fédération se confiant à un athlète de l’équipe masculine tentant de lui prescrire des scénarios pour échapper aux griffes des vampires entre les mains desquels notre sélection dépendait. Les plus faibles et les plus ambitieuses se retrouvant parfois un peu trop souvent dans la chambre ou les appartements privés de certains encadreurs, de certains responsables. Un jour dans le couloir de l’hôtel, je me retrouvais nez à nez avec un responsable étonné de ma présence en ces lieux, il se rendait dans la chambre d’une athlète! Question pour faire quoi ? Pardon ne me demandez pas! Je cours me laver les mains, la gastroenterite ne blague pas! Je ressens encore les coliques, les crampes qui ont failli me tuer!
Affaire à suivre…