Dans une tribune publiée sur compte Facebook, le lundi 17 janvier 2022, Caroline Meva, écrivaine et analyste politique parle de la situation socio-politique actuelle au Mali avec la junte au pouvoir. Le contexte où se trouve, la junte au pouvoir au Mali à date, lui est bien favorable pour reconquerir son passé glorieux, pense-t-elle. La maladresse de la France contaminée à la CEDEAO d’en haut( on le comprend aisément),en est pour beaucoup. Elle propose « l’union africaine des peuples » jalon sur la voie de la réalisation de l’Union africaine.
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Ce qui s’est passé lors de la session du Conseil de Sécurité des Nations Unies qui s’est tenue mardi le 11 janvier 2022 au sujet des sanctions de la CEDEAO contre le Mali, est inédit. La France, les États-Unis, la Grande-Bretagne ont rejeté la proposition du Mali d’organiser les élections au plus tard dans 5 ans, et ont soutenu les sanctions préconisées par la CEDEAO, mais la Chine et la Russie ont fait capoter ce projet en opposant leur veto. Ces sanctions jugées illégales et illégitimes ont provoqué la colère et l’indignation des communautés africaines à travers le monde, et par cet élan de solidarité, elles ont réussi, pour une fois, à réaliser l’union africaine des peuples, si chère aux panafricanistes de tous bords ; ce qui est déjà en soi une victoire pour le Mali et ses dirigeants. Avec l’implication de la Russie et de la Chine dans le conflit du Mali, le bloc occidental, précédemment en situation de monopole, en terrain conquis, affichant une attitude arrogante, autoritaire, dictatoriale vis-à-vis des pays africains, se retrouve soudain dans un contexte de concurrence. Le modèle du bloc occidental semble montrer ses limites et vaciller sur ses bases, après quelques coups de boutoir, comme au Rwanda, au Burundi, au Centrafrique, en Afghanistan ou en Éthiopie.
Le modèle hégémonique occidental, fondé sur la prédation, la menace, la peur, le chantage à l’aide financière et la discrimination, est de plus en plus contesté par les populations africaines. Ce système divise les citoyens d’un même pays avec d’un côté les alliés des occidentaux, privilégiés, bénéficiant d’avantages divers et autres subsides, à conditions de servir prioritairement les intérêts de ce bloc, de lui obéir au doigt et à l’œil, au détriment de leur pays et de leurs populations. D’un autre côté, face à ces privilégiés, il y a la masse pléthorique des peuples affamés, privés du minimum vital et de leurs libertés fondamentales. Ces derniers sont livrés sans défense aux prédateurs, aux dictateurs étrangers et locaux, et n’ont même pas droit de profiter des immenses richesses naturelles dont regorgent leur pays. Les dirigeants africains à la solde du bloc occidental bradent ces richesses aux multinationales et aux puissances étrangères alliées, afin de garantir leur propre bien-être et leur pérennité devant « la mangeoire ». Parallèlement, le bloc occidental ferme complaisamment les yeux sur les abus, les brimades, les tares et travers de leurs complices locaux, au nom de la préservation de leurs intérêts. Bon nombre d’africains ainsi livrés à leur triste sort, sont obligés de s’exiler, au péril de leur vie, pour tenter de survivre ailleurs, notamment en occident
Tout comme George Floyd, cet Américain de regrettée mémoire, tué par le genou de l’agent de police Derek Chauvin posé sur son cou à Minneapolis en mai 2020, de même les peuples africains se sentent martyrisés, paupérisés, bâillonnés par le genou de l’impérialisme du bloc occidental posé sur leur pays et sur leur vie. Ils n’attendent que l’occasion idoine pour laisser éclater leur ras-le-bol, tenter le tout pour le tout pour reconquérir leur liberté et leur indépendance réelle. Avec le soutien de taille apporté par la Russie, la Chine, l’Algérie, l’Iran, le Qatar, la Corée du Nord, la Guinée et beaucoup d’autre pays, force est de constater que la configuration qui a prévalu lors de la destitution de l’ex-Président Gambien Yahyah Jammeh par les troupes de la CEDEAO, n’est pas la même en ce qui concerne le Mali. Comme le dit l’adage au Cameroun, « C’est la patate qui a accepté de se laisser manger crue », ce qui signifie que, à cause de leur précipitation, de leur mauvaise évaluation de la situation sur le terrain, et surtout parce qu’ils n’ont pas compris que, 60 ans après les indépendances de façade, le contexte historique et les peuples africains ont changé. L’action de la CEDEAO et de ses alliés occidentaux est vouée à l’échec, et ils vont subir les conséquences de leur inconséquence et de leurs erreurs.
le peuple malien a hérité, non seulement d’un patrimoine matériel immense, mais aussi culturel immatériel prestigieux. L’Empire du Mali (ou Empire Mandingue, de 1230 à 1545), a été créé par l’illustre Soundiata Keita, qui est aussi l’initiateur de la Charte ou du Serment Mandén, proclamé à Kangaba, dans la plaine de Kouroukan lors de son intronisation en 1222. Les principes fondateurs ce fameux Serment servent encore de référence à l’organisation politique et territoriale du Mali aujourd’hui. En 1312, l’Empire du Mali s’étendait sur 1.294.000 km² et englobait les territoires actuels de la Guinée, du Sénégal, de la Gambie, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire et de la Mauritanie. Comme richesses culturelles historiques du Mali, il y lieu d’évoquer l’univers spirituel du peuple Dogon du Mali, sa mythologie établie des siècles avant la période coloniale, qui suscite l’intérêt des historiens et des scientifiques du monde entier par ses connaissances astronomiques. Selon leur cosmogonie, les Dogons seraient un peuple d’origine extraterrestre, descendants des « nommo », les Guides de l’Univers. Ces créatures amphibies seraient arrivées au mali par un engin spatial venant de Sirius B, une naine blanche, satellite de l’étoile Sirius qu’ils appellent « To Polo », bien avant la découverte de cette étoile en 1836 par l’astronomie moderne. Ils affirment également la présence d’un second satellite de Sirius, non encore découvert par les astronomes à ce jour. Il y a lieu de signaler également l’écriture de nombreux ouvrages en langue Malinké, grâce à l’alphabet « n’ko », inventé par Souleymane Kanté (1922 – 1987, un linguiste et pédagogue guinéen.
Les racines historiques et la grandeur du peuple Malien ont été escamotées par l’esclavage, le colonialisme et le néocolonialisme. Le Mali se présente ainsi comme la pierre d’achoppement qui risque de faire chuter le bloc occidental et ses alliés de leur piédestal, et ce rôle, par sa dimension historique, lui sied à merveille. Malgré ses immenses richesses naturelles et culturelles, le Mali est aujourd’hui un pays pauvre et très endetté dont l’honneur est bafoué. Il y a là une incongruité, une injustice flagrante et inadmissible qui méritent d’être corrigées. Si l’exemple Malien fait tache d’huile, il est fort à parier que nous sommes à l’aube d’un évènement historique d’envergure, à savoir la chute de l’impérialisme occidental multi-séculaire en Afrique, principalement de la Françafrique. La situation laisse présumer un profond bouleversement des équilibres géopolitiques du monde et une nouvelle distribution des cartes dans laquelle l’Afrique, grâce à ses immenses richesses naturelles, jouerait le rôle central d’arbitre. Il y a lieu d’espérer, toutefois, que l’Afrique est consciente des enjeux et saura comptabiliser ses avantages à son profit.