Dans son Édito du 24 janvier 2022 dans Mutations, le directeur de pulication a.i du quotidien à capitaux privés revient sur la vidéo de consommation des vins de luxe dans une loge du stade olembé. Il pense que cet acte traduit le niveau zéro de la morale des oligarques camerounais.
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Jeux dangereux
La vidéo devenue virale a choqué plus d’un Camerounais. On y voit des commis de l’État embourgeoisés, se revendiquant d’une région du pays, dans une loge Vip du Stade d’Olembe, s’enjailler en buvant du vin de luxe et en dégustant des plats de gourmets; à l’occasion d’un match de Can des Lions indomptables. Entre deux coups de fourchettes et des glouglous de bouteilles, les joyeux lurons semblent tourner en bourrique les anti-Can et les adeptes du Cameroun (du Paul Biya ?) bashing.
La scène des noceurs invétérés d’Olembe, qui reste en travers de la gorge des « Camerounais d’en bas », intervient après la mise en circulation sur les réseaux sociaux d’un message fax attribué à une personnalité de l’entourage immédiat du chef de l’État, laquelle demande de réquisitionner des places dans un vol Air France pour trois individus de petite vertu aux fins d’une « mission spéciale » d’une dizaine de jours à Yaoundé.
La toile s’est tout de suite emballée pour dénoncer des dépenses somptuaires pour une finalité questionnable au moment où la conjoncture socioéconomique est des plus austères et étouffantes et dans un contexte où le gouvernement contraint voire accule le petit peuple à se serrer encore plus la ceinture.
Alors qu’elles ne se montraient pas avares en actes de provocation et d’extravagances sur une colline de la capitale, les « influenceuses » en mission spéciale à Yaoundé, au plus fort du vent d’indignation, vont être expulsées par la police et renvoyées en France.
D’évidence, on aurait pu faire l’économie de tels scénarios au moment où les projecteurs de l’Afrique voire du monde sont braqués sur le Cameroun.
Mais comme le dit la maxime, « Dieu rend fous ceux qu’il veut perdre ».
L’épisode dégoulinant d’indécence à Olembe ou l’invitation injustifiable des « influenceuses » aux frais de la princesse montre à quel point certains Camerounais, « nouveaux riches », se situent au degré zéro de la morale. Ils démontrent à quel stade la richesse nationale est privatisée par une minorité tandis que la majorité de la population se bat au quotidien pour la survie.
A l’observation, l’oligarchie régnante ne se prive de rien pendant que le petit peuple vit d’expédients.
Les écarts qui se creusent et s’affichent chaque jour de manière décomplexée entre ces Camerounais jouisseurs et repus et les autres, le reste du monde, affamés et désabusés, constituent le carburant d’une déflagration sociale, qui n’est guère souhaitable pour un pays en quête de développement, lequel a plus besoin d’industries, de barrages hydroélectriques, d’infrastructures diverses, d’une main d’œuvre abondante, qualifiée et industrieuse que des ruines et des morts, particulièrement parmi la jeunesse, fer de lance de la nation.
Ne jouons donc pas avec le feu. Ne dessinons pas le diable sur notre mur. Il pourrait bien se retrouver dans la maison.
Par Georges Alain Boyomo