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(Tribune) Georges Dougueli : « Sans véritable démocratie, les mêmes causes produiront les mêmes effets », en Guinée

Alpha Guinee

Dans une tribune publiée le mardi 07 septembre 2021, le journaliste camerounais en service à Jeune Afrique revient sur le coup d’Etat en Guinée contre Alpha Condé. Pour lui, c’est un coup d’Etat parmi tant d’autres. Et après, rien ne va changer.

Alpha Guinee
Le colonel Mamady Dombouya et Alpha condé – capture photo

Lebledparle.com vous propose le texte intégral.

COUPS D’HIER ET COÛTS D’AUJOURD’HUI

Ça avait commencé à Lomé. Un sergent revenu d’Indochine, sachant à peine lire et écrire, avait fait assassiner le président, un brillant sujet formé à la prestigieuse London School of Economics… Ce fut la victoire du soudard sur l’intellectuel, le triomphe des ténèbres sur les Lumières. Ainsi notre imaginaire fut-il incité à percevoir les coups d’’Etats comme des cauchemars traumatisants. Mais ça, c’était les coups d’hier. Aujourd’hui, on s’étonne que l’expression « Putschs salutaire » ne soit plus un oxymoron. Les mutineries sont devenues la solution espérée et attendue pour nous débarrasser des présidents à vie. Quand elles surviennent, elles sont applaudies et leur auteur fêté en héros. Comment le crépitement des armes a-t-il pu devenir un son agréable aux oreilles ? Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?

Il y a cinquante ans, les coups avaient quelque chose de … théâtral. C’étaient des tragédies dans leur scénarisation et dans leur extrême cruauté. Les putschistes d’hier étaient des dramaturges agissant sous le joug de passions primaires qui les conduisaient à mettre en scène la disparition de l’objet de leur détestation, histoire de marquer les esprits. La palme d’or revient à l’élimination de Samuel Doe et de Nino Vieira. Pour eux, ça s’est fini à l’arme blanche tel un crime passionnel.

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L’époque a changé, les mutins aussi. Ceux d’aujourd’hui sont des technocrates de la violence car formés aux meilleures écoles de guerre et entrainés à réussir leurs opérations. Ils tiennent compte de la météo, parlent trigonométrie en calculant les azimuts de leurs pièces d’artillerie, chronomètrent leurs assauts carte d’état-major en main…

Les putschistes de nos jours contrôlent leurs émotions. Ils pourraient même expliquer au président déchu que « ça n’a rien de personnel » que cela ne serait pas un gros mensonge.  Mali, Tchad, Guinée … Les coups d’Etats se succèdent et se banalisent. Au point que, 48 heures après le non-événement de Conakry, je serais passé à autre chose si mes amis ne m’incitaient à commenter cette affaire.

COÛTS D’AUJOURD’HUI

Face à la banalisation de la violence insurrectionnelle, nous sommes dépités. Et blasés. Oui, Alpha, c’est fini. En revanche s’agissant de la Guinée, c’est reparti pour un tour : l’heure est au partage des postes et aux gouvernements d’union nationale, à la révision constitutionnelle, aux élections, etc. Mais rien de tout cela n’extirpera le cancer qui ronge la Guinée : le tribalisme anti-peul et ce consensus tacite qu’on entretien pour exclure une communauté plutôt que de créer un Etat démocratique ouvert pour tous. Sans véritable démocratie, les mêmes causes produiront les mêmes effets. A l’issue de ce énième intermède militaire, le pouvoir sera rendu à un nouveau politicien civil élu sur la base d’un beau programme. Puis, fatalement, il se fera monter le bourrichon par les griots, les flatteurs et les profito-situationnistes. En cours de second et dernier mandat, il finira lui aussi par se découvrir des qualités d’homme providentiel. La folie durera jusqu’au jour où ses propres nervis le démettront pour le faire disparaître dans les oubliettes du déshonneur.

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Le scénario se répète à l’infini mais peu d’entre ces gens-là retiennent la leçon. Les présidents à vie s’accrochent en misant sur leur bonne étoile. Ça n’arrive qu’aux autres, croient-ils. Quitte à se convaincre qu’ils gagnent vraiment les élections alors que l’absentention élevée devrait les alerter.

Chers amis, serrons les dents. Les coups vont pleuvoir.


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